Volodimir Zelenski, le président ukrainien, a été invité par le gouvernement d’Athènes (extrêmement pro-américain et pro-OTAN) à s’exprimer devant le Parlement grec le 7 avril.
Il a prononcé un discours au vitriol, plein d’accusations, contre la « Russie nazie ». Mais il a fait quelque chose de plus. A la fin de son discours, il a donné la parole à un membre du bataillon néo-nazi Azov pour qu’il s’adresse au Parlement grec.
Et il l’a fait dans la capitale d’un pays qui est celui qui a le plus souffert de la barbarie nazie en Europe.
Les Grecs, bien que condamnant l’intervention russe en Ukraine, ne sont pas du tout enthousiastes face à l’hystérie anti-russe, aux mesures prises contre la Russie, y compris les citoyens russes et la civilisation russe, et au néo-mcarthysme qui domine la vie politique et les médias grecs, comme dans tout le monde occidental, et qui menace ce qui reste des droits démocratiques élémentaires en Occident. Ils se souviennent aussi très bien que les États-Unis ont imposé une dictature dans leur propre pays en 1967. Ils se souviennent aussi très bien que la Turquie, membre de l’OTAN, agissant sur les encouragements d’Henry Kissinger, a envahi Chypre en 1974 et y maintient toujours une énorme force d’occupation. Les Grecs n’ont pas non plus oublié les bombardements et les invasions de la Yougoslavie, de l’Irak ou de la Libye. Ils sont opposés à l’intervention militaire russe, mais ils reconnaissent également que Moscou a des préoccupations légitimes et importantes en matière de sécurité.
Selon un sondage publié par le journal grec Demokratia le 6 avril, 2,1% de la population attribue la responsabilité du conflit actuel à l’Ukraine, 27,8% à la Russie, 31,1% aux puissances occidentales et 37,1% à toutes les puissances. 71,6% de la population est contre la décision du gouvernement de fournir des armes à l’Ukraine. Et 55% des Grecs étaient contre la décision d’inviter Zelenski à s’exprimer devant le Parlement grec.
Mais lorsque les Grecs ont vu un « militant d’Azov » néonazi, une figure de gangster, s’adresser à leur parlement, l’indignation a explosé dans les médias sociaux.
Tous les partis d’opposition ont condamné cette apparition et accusé le gouvernement. Même l’ex-PM du parti au pouvoir, Nouvelle Démocratie, Antonis Samaras, a parlé d’une « grave erreur ».
Si l’objectif de Zelenski (et de ses conseillers américains, qui organisent très probablement ses « apparitions ») était d’attirer un peu de sympathie pour son pays et pour lui-même, ou de légitimer le tristement célèbre bataillon Azov, il a obtenu exactement le contraire. Sa présence a eu un écho immédiat à Chypre, où le plus grand parti d’opposition, le parti de gauche AKEL, a décidé de s’abstenir lors du discours qu’il a prononcé devant le parlement chypriote après son discours grec.
Certains observateurs bien informés pensent que Geoffrey Pyatt, ex-ambassadeur des États-Unis à Kiev (pendant le coup d’État de 2014) et maintenant à Athènes, une personne très fanatique, a probablement joué un rôle avec ses conseils dans le fiasco du discours de Zelenski, mais il n’y a aucun moyen de prouver ou de réfuter une telle allégation.
Au contraire, il est possible que le 7 avril reste dans l’histoire comme le début d’une nouvelle crise profonde en Grèce. Il est tout à fait évident que l’élite politique actuelle du pays est en contradiction directe avec les souhaits du peuple dans tous les problèmes importants et critiques, y compris la situation économique et sociale désastreuse qui va encore se détériorer en raison des sanctions appliquées contre la Russie.
Dimitris Konstantakopoulos
Athènes, 7/4/2022