Par Dimitris Konstantakopoulos
Toute personne raisonnable sur cette planète ne peut que saluer la décision de Trump de mettre fin au conflit en Ukraine et espérer que cela conduira effectivement à l’arrêt d’une guerre qui a causé des destructions terribles dans ce pays, ainsi que des dommages considérables en Europe. Ce conflit nous a exposés à un risque sérieux de guerre nucléaire européenne, voire mondiale, et a provoqué des catastrophes écologiques majeures. Un conflit qui aurait pu être évité si les régions peuplées majoritairement de populations ethniquement russes n’avaient pas été incluses dans l’Ukraine indépendante, si le coup d’État de la CIA à Kiev en 2014 n’avait pas eu lieu, si le régime qui a pris le pouvoir à l’époque n’avait pas pris immédiatement des mesures contre les populations russes et russophones, si les accords de Minsk avaient été appliqués, et si l’OTAN n’avait pas cherché, en s’étendant continuellement, à conquérir le monde entier et à installer des armes nucléaires à sept minutes du Kremlin.
La défaite de l’Occident
En substance, ce que Trump a fait, c’est reconnaître que l’Occident a été vaincu et que toute persistance dans des objectifs irréalistes en Ukraine nuit à la concentration de l’énergie occidentale sur le conflit avec la Chine, ainsi qu’aux efforts de son mentor, le Premier ministre israélien, pour avaler si possible tout le Moyen-Orient. De plus, la prolongation du conflit et des sanctions multiplie les motivations des alliances anti-occidentales, de l’abandon du dollar, etc.
L’Occident a été vaincu en Ukraine dans le sens où il n’a pu réaliser ses objectifs, qui étaient le renversement du régime de Poutine, la transformation de la Russie en un État bananier bien pire que sous Eltsine, et son démembrement (un objectif explicitement poursuivi par Brzezinski dans les années 1990). Nous avons expliqué dans nos articles, dès le début, en mars 2022, que ces objectifs étaient irréalistes, que la Russie ne peut pas être vaincue militairement, et que même si l’Occident s’approchait d’une telle victoire, nous aurions une réponse nucléaire de Moscou, une éventualité qui a été sérieusement envisagée à l’automne 2022, selon des informations fiables. Nous avons écrit cela dans un appel international pour arrêter l’effusion de sang, un appel que nous avons signé, avec une série d’intellectuels d’Europe et du monde entier, durant l’été 2022, lorsque prsesque personne n’osait ouvrir la bouche pour protester contre l’OTAN https://www.defenddemocracy.press/arretez-la-guerre-levez-les-sanctions-faites-le-maintenant/.
Il aura donc fallu trois ans pour que le rationalisme l’emporte sur l’irrationalisme et que la paix triomphe de la guerre. Et le prix sera énorme, car au lieu de se soulever contre la guerre, les forces démocratiques ou de type « gaulliste » en Occident, ainsi que la prétendue gauche, ont préféré, sous diverses excuses, s’accrocher aux rêves arrogants de l’empire américain et occidental mondial.
Et cela se produit parce dans le fond, presque toutes les élites occidentales, même celles qui se considèrent de gauche, croient qu’elles appartiennent à une race « civilisée » supérieure destinée à gouverner l’humanité et chargée de jouer un rôle spécial sur Terre, un rôle que les musulmans, les Noirs, les Chinois, les Russes et autres « races inférieures » ne peuvent évidemment pas jouer.
Le résultat en est un grand besoin historique exprimé par l’extrême droite américaine, et l’humanité risque de le payer très cher. Il y a déjà des signes très graves avec le mépris provocant du nouveau président américain envers toute notion de droit international, ses menaces contre les Palestiniens, le Groenland, le Canada, le Panama et même encore pour le climat de la Terre, des similitudes troublantes que le ministre russe des Affaires étrangères a lui-même notées entre le slogan « America First » et le slogan « Deutschland über Alles » d’Hitler. Mais aussi avec sa volonté de réduire toutes les dépenses sociales si possible et d’arrêter encore même la collecte de données scientifiques sur la pollution atmosphérique, de peur que ses amis milliardaires ne soient dérangés. Le résultat final sera un capitalisme et un impérialisme bien plus durs, dangereux et destructeurs. Et l’espoir de certains, et la crainte d’autres, qu’il dissoudra l’OTAN ne peut être considéré que comme une anecdote. Et même s’il la dissolvait, ce qu’il n’a aucune raison de faire, il le ferait simplement pour créer quelque chose de bien pire.
L’Europe sous le choc
Ayant été profondément impliqués, sur ordre de Washington, dans une politique totalement destructrice, les dirigeants politiques européens, à de rares exceptions près, ont beaucoup de mal à l’abandonner, comprenant à juste titre que ce serait leur suicide politique. En France, une atmosphère quasi guerrière règne soudainement, combinant le ridicule et le dangereux, avec le président Macron prêt à se lancer en campagne pour sauver l’Ukraine ! En pleine frenesie guerrière Macron convoque les militaires de l’ OTAN pour une mission en Ukraine!
La France croit qu’elle incarne une mission spéciale depuis l’époque de la Révolution française. Et elle a joué en effet un rôle énorme dans l’histoire et la culture européennes, bien que sur le plan militaire, je ne me souvienne pas qu’elle ait gagné une seule grande bataille depuis Austerlitz. La France a voulu s’imaginer qu’elle faisait la même chose aujourd’hui, qu’elle accomplissait sa mission historique en manifestant une solidarité envers les Ukrainiens confrontés aux barbares russes. Mais ce qu’elle a fait, c’est détruire les Ukrainiens au profit des faucons des États-Unis et de la CIA. La France de Sarkozy, Hollande et Macron n’a rien à voir avec la France de De Gaulle, ni même avec celle de Chirac et de de Villepin. Elle est devenue une misérable colonie de l’Amérique et du Sionisme. Le changement soudain de la politique américaine risque de démasquer l’élite française et de prouver qu’elle n’est presque rien internationalement. C’est pourquoi elle réagit avec hystérie et panique.
Nous espérons cependant que les ennemis de la paix ne sont pas en mesure de saper la politique de Trump, car si ses efforts pour arrêter la guerre ici échouaient, le risque de conflagration nucléaire augmenterait. Nous espérons que toutes ces histoires de Macron se révéleraient simplement des absurdités futiles incapables d’être mises en œuvre, une preuve supplémentaire du niveau infantile de la pensée politique des dirigeants européens actuels.
L’Europe de l’armement
Mais même si cette destruction sera évitée, in s’en prépare une autre. L’Union européenne s’apprête à détruire ce qui reste de l’État social européen, une de plus grandes conquêtes, avec son équivalent soviétique, dans toute l’ histoire de l’ à interrompre tout effort de lutte contre la pollution et à détruire les politiques de cohésion rudimentaires de l’UE pour se réarmer massivement, peut-être même avec des armes nucléaires, sur la base de l’argument propagandiste ridicule que la Russie, la même Russie qui a dissous le Pacte de Varsovie et l’URSS, constitue une menace militaire et se prépare à envahir la Moldavie, la Roumanie et ensuite tous les autres pays.
Au lieu de demander une réduction drastique des armes conventionnelles et nucléaires en Europe, comme convenu il y a 35 ans, afin de diriger les énormes fonds vers les très grands besoins sociaux, de développement et écologiques, au lieu d’abolir immédiatement les sanctions contre la Russie et de commencer à importer du gaz naturel russe, moins cher et plus respectueux de l’environnement que le GNL américain, la direction incohérente et belliciste de l’UE s’oriente vers une augmentation monstrueuse de ses dépenses militaires, afin de « apaiser » le nouveau président sauvage des États-Unis. Si elle réussit à le faire, alors le résultat le plus probable sera d’accélérer la crise économique qui la menace déjà.
En d’autres termes, elle nie elle-même les raisons fondamentales pour lesquelles les peuples d’Europe ont soutenu le projet de leur unification.
L’Europe n’ a nul besoin de plus d’armes. Elle a besoin de plus de dépenses sociales et écologiques, de plus d’investissements publics, d’investissements dans les infrastructures qui seront menacées d’effondrement total en raison du changement climatique, etc. Elle a besoin d’une réforme courageuse et radicale de l’Union elle-même et d’un virage complet et radical de la politique de militarisme et d’impérialisme que suit l’UE en Ukraine et en Palestine, vers une politique de paix. L’Europe doit se transformer d’un instrument des Américains en un phare de paix et de culture dans un monde « multipolaire », sur les traces de Charles de Gaulle, Olof Palme, Willy Brandt, Andréas Papandreou.
Pour l’instant, elle se dirige dans la direction opposée.
