Culture populaire

Par Panagiotis Grigoriou
30 janvier 2019

Le quotidien reprend parfois le pas sur le prétendu politique. De la situation, il faut parfois en rire, à défaut d’autre défense pour l’instant. Ces médiocres politiciens marionnettes imposent le chaos jour après jour, et même ils s’en vantent. Le pays réel se retrouve alors dans ses tavernes pour chanter et grignoter. Culture populaire encore vivante, le sourire qui revient entre deux discussions et on y fait face. Encours de fin de mois.

Le Putsch macédonien de Tsípras et des autres est ressenti comme un coup de poignard dans le dos du corps social. Il y aura un avant comme un après, additionné de la sorte à celui du référendum trahi par ces mêmes en juillet 2015. Le quotidien reprend le pas sur le supposé politique, les caïques quittent toujours leur port d’attache et le “Parlement” sera encore bien gardé par les forces de l’ordre.

Le pays ne se calme pourtant pas. Lors des matchs de football dimanche dernier, les fidèles des équipes ont déployé de leurs banderoles… farouchement opposées à la politique macédonienne de Tsípras, et plus généralement opposées à l’ensemble du personnel politique. Supporteurs des équipes, et qui ne sont pas exclusivement celles de la Macédoine grecque comme PAOK de Thessalonique, le phénomène concerne autant l’Olympiakós du Pirée ou l’équipe de Tríkala, ville thessalienne près des célèbres Météores. Culture populaire… et même “populiste” nous disent-ils ceux “d’en haut”. La Grèce déjà pliée en quatre se trouve désormais coupée en deux morceaux. Bien joué…

Pour mon cousin de l’autre quartier d’Athènes, “c’en est fini des discussions avec eux. Ces Syrizístes, comme d’ailleurs les autres autochtones de la gauche, ceux qui ne comprennent pas que nous n’avons qu’une pauvre et petite patrie et enfin, une identité à défendre après avoir perdu la moitié de notre pain quotidien, tous ces gens ne sont plus fréquentables, ils viennent de la planète Mars. Dès que nous ouvrons notre bouche, ils nous traitent de fascistes et de nationalistes, donc ce n’est vraiment plus la peine.”

Mon ami H. est encore plus radical. Qu’ils “viennent me chercher, ils découvriront… alors d’autres manières.” La presse rapporte que les forces de l’ordre protégeront mieux les 153 élus de l’accord macédonien, lorsqu’au même moment, des domiciles d’élus et cadres Syrizístes sont attaqués au Nord de la Grèce et qu’en déplacement à Thessalonique, le Président de République Prokópis Pavlópoulos a été accueilli par certains manifestants le traitant de “traître”. Mauvais climat, vent maladif.

“C’est une déchirure d’une telle gravité dont nous n’avions guère besoin en ce moment, sauf que les salopards de SYRIZA ne tiennent alors compte de rien, ils sont les plus immoraux de tout le personnel politique de l’après la Guerre Civile”, poursuit-il mon cousin. Et c’est une déchirure je dirais qui dépasse même les clivages de classe, pourtant plus terribles que jamais.

Invité par un ami journaliste pour échanger sur la situation de… notre Hellénisme dernier dans un café des quartiers parmi les plus aisés de l’agglomération athénienne, nous avons alors été les témoins de la scène suivante: Le Ministre des Finances Tsakalótos accompagné d’une autre personne, a fait son entrée dans l’établissement pour s’asseoir autour d’une table. Il a aussitôt régné un profond silence et l’on pouvait sentir s’installer durant quelques instants un malaise chez les clients du café, à mesure que Tsakalótos était reconnu.

Pas un seul mot, ni geste. D’habitude les Grecs, quel que soit leur sensibilité, ils ont l’habitude de saluer ceux de la politique, et ils réagissent, certes parfois, pas forcement de manière positive. Là rien de tel. Suffisamment loin de la table de Tsakalótos, deux retraités de la vielle bourgeoisie athénienne ont alors murmuré sur un ton confidentiel: “Le voyou, il se montre même publiquement et il n’a pas honte.” Grèce bourgeoise, vieux monde suranné et cependant modéré dans ses réactions “à chaud”. Et c’est visiblement toujours et encore cette déchirure d’une telle gravité dont nous n’avions guère besoin en ce moment.

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Pour le reste, aux quartiers huppés où me baladant en voyageur, j’ai encore découvert combien leurs boutiques sont fréquentées, lorsqu’elles ne sont pas certes en faillite. J’ai découvert par la même occasion que visiblement seuls nos animaux adespotes franchissent alors les territoires des classes comme les injustices sociales sans trop d’entraves. Pays réel et riche, et pourtant on y découvre en ces lieux de l’immobilier en décadence, également mis en vente comme partout ailleurs en Grèce.

Le visiteur curieux y découvrira également ces nouveaux habitants perceptibles des lieux, car comme il est constaté ailleurs, parfois, ces bourgeois du pays d’Aristote et d’Onassis, “se font remplacer, pas forcément par ceux que l’on croit, mais par ces bourgeois itinérants, européens, américains, chinois, qui ont fait de cette planète leur résidence secondaire en attendant un départ dans l’espace qui ne vient pas…” . Pays alors en crise myasthénique, à la pathologie causale infligée par du néolibéralisme imposant ces thérapies de choc dont les quartiers huppés finissent par s’en rendre tout de même compte.

emps des déchirures et autant époque de cette normalité alors rugueuse, car plus inégalitaire que par le passé certes récent. Athènes-centre déjà se transforme en grand chantier des hôtels, des résidences et des logements Airbnbistes pour passagers se croyant perpétuels. Et ailleurs, sur le littoral surtout, c’est du pareil au même. Promoteurs, grecs, européens, américains, voire chinois, israéliens ou libanais d’après la presse du jour, l’hôtellerie ou l’Eldorado redécouvert.

Depuis le port de Rafína en Attique, les gens du coin examinent les environs de Mati en face, quartiers alors ravagés par le feu de juillet dernier, ce feu aux cent morts que l’appareil de l’État a fait ainsi brûlé déjà par incompétence, et que de nombreux Grecs alors considèrent comme suspect: “Les rapaces viendront acheter pour y enfoncer leur business”, entend-on à Rafína, ou sinon, de l’économie sur brûlis.

Cependant, bien au-delà des faubourgs aisés de l’agglomération d’Athènes le quotidien reprend autant le pas sur le supposé politique. Surtout et d’abord aux quartiers du pays réel, où l’on peut encore s’offrir certaines de ces soirées populaires en musique vivante, et parfois même danser. Entre deux verres de vin, une salade bien méritante et deux fromages forcément crétois, histoire de commenter les matchs de foot à la télévision toujours allumée même lorsque le son coupé. Comme également commenter nos mauvaises et parfois bonnes nouvelles.

Car les bonnes nouvelles ne manquent pas, à commencer par celles que l’on croit élémentaires, passant du chien trouvé à Athènes ou de la biche sauvée en Attique par les Pompiers, aux retrouvailles des tavernes entre Grecs dans l’adversité et ce n’est pas rien. Les récents agissements de “notre” système despotique cristallisent alors les mentalités, et de manière on dirait inéluctable comme irréparable. La radicalisation des esprits et qui n’est pas encore… celle des corps, ne désarmera plus, et voilà comment les Tsiprosaures jouent alors avec le probable feu à venir.

Même la presse très autorisée et mainstream peut rendre compte des réalités, par exemple, en caricaturant, le “pseudonyme” aux yeux des Grecs, désormais accordé sous le nom de “Macédoine” au seul bénéfice du pays voisin. Notons que la figure du “singe” du dessin évoqué, renvoie alors à la contrefaçon, car en grec moderne, tout produit issu de la contrefaçon est qualifié de “singe” dans le langage courant. Une partie de la presse grecque, rappelle également qu’en 2008, l’actuel Premier ministre à Skopje, Zaev s’était retrouvé menotté dans une présumée affaire de droit commun, certes relâché par suite.

Puis, de manière bien plus anthropologique et ainsi dramatique, il y a cet étonnant dessin de presse que le quotidien “Kathimeriní” vient de publier. On y découvre la figure familière du Soldat Inconnu en son lieu de mémoire célèbre à Athènes… cependant, dans une posture bien curieuse, voire, suggérant de manière sous-entendue aux yeux de nombreux Grecs, le outrage fait à sa mémoire. C’est tout le sens du dessin, à lire évidemment sous un certain angle en plutôt en deuxième lecture, et qui donc exprime à sa manière les mentalités grecques actuelles. Celles bien précisément, cristallisées depuis le Putsch parlementaire de Tsípras et des autres, comme pour marquer le moment historique de son coup de poignard dans le dos du corps social et identitaire du pays.

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Même les éditorialistes historiques du mainstream, et qui se lâchent on dirait en vieillissant, s’y mettent aussi quelquefois, à l’instar de Pretentéris au quotidien “Ta Néa”. Le célèbre journaliste de la presse systémique, rappelle ainsi certains faits, dont la rencontre entre Tsípras et Zaev du 17 mai 2018 à Sofia, et ensuite ce que Zaev avait restitué aux autres chefs politiques à Skopje deux jours plus tard, toujours au sujet de l’accord en vue et pas encore signé entre lui et Tsípras. D’après ce que le quotidien “Kathimeriní” avait déjà révélé en octobre 2018, un reportage jamais démenti depuis, rappelle-t-il alors Pretentéris, Zaev a même voulu rassurer les siens, précisant que l’accord passerait certainement en Grèce, rien que par l’ajout précieux des voix des élus du parti de la Rivière de Stávros Theodorákis en tant et en heure. Donc… Zaev était visiblement très bien informé en mai 2018, quant aux… futurs événements de janvier 2019.

Détail… dans cette affaire, lorsque finalement en décembre Kamménos et son parti ANEL au gouvernement ont-ils déclaré qu’il s’opposerait à cet accord, Stávros Theodorákis du parti de la Rivière avait été aussitôt reçu par l’Ambassadeurs de États-Unis Geoffrey Pyatt. La suite est connue. Le vote de confiance à l’Assemblée précédant de quelques jours seulement celui de la ratification de l’accord, n’a été possible que grâce à un député de Stávros Theodorákis. Et bien entendu, l’accord est passé sans majorité SYRIZA mais encore, grâce aux élus de Theodorákis, et aux quelques apostats de Kamménos et d’ailleurs. “Donc Zaev est peut-être un sacré devin, sauf que notre cerveau fonctionne encore, et il ne faut pas nous prendre pour des idiots”, conclu-t-il alors Pretentéris, “Ta Néa” du 29 janvier 2019.

Notons que très accessoirement, Koudourá, toujours Ministre du Tourisme et figure… chez les Apostats du parti de Kamménos, serait d’après la presse, “toujours redevable envers les banques d’un… petit million d’euros, et que comme elle ne rembourse plus de manière disons toujours convenable, Eurobank d’ailleurs avait engagé des poursuites à l’encontre de Koudourá”, presse de la semaine. Sauf que la carrière politique de Koudourá aura fait d’elle… une intouchable, au même moment où pour quelques milliers d’euros, de millions d’autres Grecs se voient saisir leurs biens par les banques et par les autorités du fisc, celui que le gouvernement Tsípras – Koudourá ont fait passer sous le contrôle étranger de la Troïka élargie.

Et quant à Kamménos, le journaliste Trángas, dans son émission matinale sur 90.1 FM du 30 janvier 2019, prétend alors “qu’un étrange entremetteur aurait rencontré Kamménos au domicile d’un ancien ministre Nouvelle Démocratie, lui proposant trois millions d’euros pour que le Ministre de la Défense change d’avis sur l’accord macédonien en préparation. C’est pour cette raison que peu après, Kamménos il s’est autant emporté en plein Conseil des Ministres, avançant que pour que l’accord puisse passer il y a eu cinquante millions sur la table, et que les autres ministres, Tsípras compris n’ont pas réagi. Eh bien, je dirais qu’il y a eu au total 250 millions sur la table à Athènes pour faire passer l’accord.” Étranges medias, drôle d’informations et surtout, une supposée Justice qui n’intervient pas. Conclusion provisoire, la méta-démocratie actuelle, aura autant ôté le peu “d’insonorisation” subsistante, même de façade, entre les pratiques des politiciens et celles de la mafia. Oui, la société ouverte de Soros veut imposer le chaos partout et c’est presque chose faite.

Pour faire court, une certaine presse suggère, et alors le peuple se le dit ouvertement que les politiciens ont trahi le pays et bafoué la Constitution, déjà pour trois sous, “SYRIZA et les autres ce sont de vraies mafieux, en plus du reste”, me dit-il mon cousin et c’est son opinion alors arrêté.

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En attendant, le gouvernement radicalise ses pratiques, toute opinion contraire à l’esprit et à la lettre de l’accord Macédonien de l’Ambassadeur Pyatt, de la Chancelière Merkel et du petit Tsípras, peut même conduire les “récalcitrants nationalistes” devant les commissions de bonne conduite de la fonction publique, comme pour cette institutrice de Thessalonique, voire, devant les Tribunaux, presse grecque du 29 janvier. .

Dans le même ordre d’idées, une conférence au sujet de la Macédoine grecque, fixée de longue date pour avoir lieu au Musée de la Guerre et initiée par les Associations des officiers à la retraite, vient d’être annulée. Elle a été interdite dans l’urgence, en dépit de l’autorisation déjà accordée, par décision du nouveau Ministre de la Défense Apostolákis, pourtant chef d’État-major des armées il y a encore deux semaines, en conformité d’ailleurs avec l’article 6 du traité Macédonien de Tsípras-Zaev. Les Associations organisatrices ne se laissent pas intimider et elles sont à la recherché d’une autre salle pour leur conférence. Depuis la radio 90.1 FM, des journalistes tels que Kalarrýtis, appellent à ne pas céder à cette pseudo légitimité et notamment pénalisation des opinions, à la manière de la dictature des Colonels, voire, de celle de l’Occupation Allemande des années 1940, (émissions du 27 et 28 janvier).

En Thessalie et pas seulement, les agriculteurs manifestent et le gouvernement frappe fort dès le premier jour de la sortie des engins agricoles sur le bitume, histoire de pénaliser l’affaire car déjà dix paysans ont été convoqués devant les Tribunaux de la région. C’est aussi une première à la SYRIZA il faut dire, signe aussi et qui ne trompe pas quant au durcissement du régime colonial comme du nouvel indigénat sous le règne de la géopolitique réellement existante, comme de l’européisme décrié désormais de partout.

Autre entorse faite au régime supposé démocratique, c’est la première fois depuis la fin de la dictature des Colonels qu’un officier actif accède à une fonction politique, qui plus est, celle du Ministre de la Défense, avant que le décret de sa mise en retraite ne soit signé. La démocratie est morte et avec elle, toutes les illusions quant au caractère prétendument populaire et démocratique de la gauche en tout cas à la grecque, les pauvres apparences n’avaient alors qu’à suivre et c’est chose faite.

Pour finir avec le sens des réalités, Aléxis Tsípras, dialoguant avec Emmanuel Macron lors du Sommet méditerranéen qui s’est tenu à Chypre, a-t-il répété ses mensonges et autant calomnies habituels quant à l’approbation de l’accord macédonien par le peuple grec. “Ceux qui savent réfléchir sont de notre côté” a-t-il répété, traitant ainsi d’idiots en réalité, tous ceux qu’en Grèce incarnent alors la majorité écrasante et donnant les faux chiffres au Président Macron, quant à participation populaire aux rassemblements récents contre l’accord macédonien. Cet échange Tsípras – Macron, reproduit en boucle sur tous les medias en Grèce, provoque encore l’indignation et le dégoût alors profond des Grecs. “Tsípras est un charlatan de premier ordre”, entend-on ce matin dans le café du coin à Athènes.

Au café-taverne des Crétois à Athènes, sous les figures accrochés sur les murs, celles de l’homme politique de jadis Elefthérios Venizélos, de Domínikos Theotokópoulos et de Níkos Kazantzákis, on discute et on commente l’actualité, surtout lorsque les opinions sont alors arrêtées.

Et il y a surtout de notre musique, car le pays réel se retrouve coûte que coûte pour chanter en grignotant. Culture populaire encore ardente, le sourire qui revient entre deux discussions. En effet, de la situation, il faut parfois en rire c’est bien connu, comme pour affronter le chaos et l’hybris.

Il y a de notre musique, ainsi que notre Mimi et Hermès de Greek Crisis, quand le quotidien reprend le pas sur le supposé politique.

http://www.greekcrisis.fr/2019/01/Fr0705.html