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Centenaire Balfour: La Palestine cent ans après

By René Naba
Novembre 27, 2017

Journaliste-écrivain, ancien responsable du Monde arabo musulman au service diplomatique de l’AFP, puis conseiller du directeur général de RMC Moyen-Orient, responsable de l’information, membre du groupe consultatif de l’Institut Scandinave des Droits de l’Homme et de l’Association d’amitié euro-arabe. Auteur de “L’Arabie saoudite, un royaume des ténèbres” (Golias), “Du Bougnoule au sauvageon, voyage dans l’imaginaire français” (Harmattan), “Hariri, de père en fils, hommes d’affaires, premiers ministres (Harmattan), “Les révolutions arabes et la malédiction de Camp David” (Bachari), “Média et Démocratie, la captation de l’imaginaire un enjeu du XXIme siècle (Golias). Depuis 2013, il est membre du groupe consultatif de l’Institut Scandinave des Droits de l’Homme (SIHR), dont le siège est à Genève et de l’Association d’amitié euro-arabe. Depuis 2014, il est consultant à l’Institut International pour la Paix, la Justice et les Droits de l’Homme (IIPJDH) dont le siège est à Genève. Depuis le 1er septembre 2014, il est Directeur du site Madaniya.

« Si j’étais un dirigeant arabe, je ne signerai jamais un accord avec Israël. C’est normal : Nous avons pris leur pays. Il y a eu l’antisémitisme, les Nazis, Hitler, Auschwitz, mais était-ce leur faute ? Ils ne voient qu’une seule chose : Nous sommes venus et nous avons volé leurs terres. Pourquoi devraient-ils accepter cela ?»

David Ben Gourion, premier chef du gouvernement israélien, le 18 juillet 1948, dans les semaines qui suivirent la déclaration unilatérale d’indépendance de l’État Hébreu.

La permanence du géotropisme occidental ou le complexe de Gibraltar

Il serait fastidieux et vain de dresser une chronologie de l’Histoire de la Palestine, c’est-à-dire le récit linéaire des événements tels qu’ils se sont produits depuis la promesse Balfour jusqu’à nos jours, plus exactement depuis la promesse de création d’un Foyer National Juif en Palestine, jusqu’à la prolifération et la consolidation de bantoustans sous occupation israélienne, autour des grandes agglomérations urbaines palestiniennes, Ramallah, Bethléem, Naplouse, Hébron et Djénine.

Des Bantoustans, en guise de Foyer National Palestinien, ayant vocation à constituer le futur état palestinien que les pays occidentaux veulent ériger en guise de solde de tout compte d’un conflit centenaire et dont la responsabilité première incombe exclusivement aux pays occidentaux.

Pas une histoire totale donc, mais une histoire problématisée, c’est-à-dire une histoire qui essaye d’expliquer les raisons de ces événements. Il incombe, pour ce faire, de procéder à un décryptage de l’histoire récente ou plutôt à la déconstruction des mythes fondateurs de la stratégie occidentale à l’égard de la rive méridionale de la Méditerranée, sa rive arabo-musulmane.

La théorie du vacuum, « le Res Nullus »

L’Europe, qui a longtemps symbolisé l’Occident, n’a jamais pardonné aux Arabes non seulement la conquête de la rive méridionale de la Méditerranée mais aussi la rive africaine de l’Océan Atlantique. A une époque où la navigation maritime constituait la principale voie de ravitaillement des Métropoles, la présence de l’Islam sur les rives africaines de l’Atlantique a été perçue par l’Europe une menace stratégique sur la navigation transocéanique occidentale, celle reliant l’Europe à l’Amérique Latine (via Dakar).

Au delà de la conquête de marchés captifs et des réserves de matières premières, la colonisation de la Méditerranée a répondu au souci de neutraliser cette menace potentielle ou virtuelle. Cela quand bien même nulle poussée arabe n’a été enregistrée en direction de l’Europe depuis près de quatre siècles, soit pour les Arabes, depuis la perte de Grenade en 1492 et la restauration de la souveraineté catholique sur l’Espagne. Nulle poussée musulmane, non plus, depuis le retrait des troupes musulmanes de l’Empire ottoman des portes de Vienne, le 13 avril 1683. Sous couvert d’une motivation religieuse (la libération du tombeau du Christ à Jérusalem), les Croisades répondaient à cette préoccupation. La colonisation aussi.

Les grands principes universels découlent rarement de considérations altruistes. Elles répondent davantage à des impératifs matériels. Du temps des Croisades, le mot d’ordre mis en avant était la « libération du tombeau du Christ ». Le sac de Constantinople constituera, à cet égard, selon l’historien Jacques Le Goff, une des pages honteuses de l’histoire de l’Occident.

Du temps de la colonisation, ce sera « le fardeau de l’homme blanc » et son double corollaire économique, -la liberté de navigation et la liberté du commerce et de l’industrie-, c’est-à-dire la liberté pour l’Europe de façonner à son image les territoires conquis, d’asservir les peuples, et sous prétexte de civilisation et de modernité, de coloniser leurs territoires pour son expansion économique.

Le promontoire de Gibraltar qui contrôle la jonction Mer Méditerranée-Océan Atlantique est bien revenu sous souveraineté européenne, en fait anglaise, mais les Occidentaux ne se sont jamais libérés du complexe de Gibraltar. Gibraltar (Jabal Tareq), qui tire son nom du conquérant arabe Tarek Ben Ziad continue de retentir dans le subconscient occidental comme un camouflet stratégique majeur.

Toutes les voies de communications maritimes de l’espace arabe sont ainsi depuis quatre siècles sous contrôle occidental. Gibraltar pour la jonction Méditerranée-Océan atlantique, l’île de Massirah, -dans le sultanat d’Oman, qui contrôle le détroit de Bab et Mandeb-, pour la jonction Golfe arabo-persique/Océan indien, enfin Chypre, ou plutôt les bases d’Akrotiri et de Dekhélia pour la jonction Méditerranée- Golfe-Océan indien, via le Canal de Suez.

Les deux bases de souveraineté anglaise de Chypre ont été aménagées en base anglaise de repli après la perte du Canal de Suez, auparavant sous condominium franco-anglais. La nationalisation de la voie d’eau, en 1956 par Nasser a d’ailleurs donné lieu à une expédition punitive franco-anglo-israélienne, première opération militaire conjointe israélo-occidentale contre le Monde arabe destinée à châtier un dirigeant nationaliste arabe, Gamal Abdel Nasser, coupable d’avoir cherché à récupérer sa principale richesse nationale, le Canal de Suez.

D’autres expéditions punitives ont eu lieu depuis Suez. Les guerres croisées des États-Unis en Irak pour le compte d’Israël, depuis 2003, la guerre d’Israël au Liban contre le Hezbollah pour le compte de l’Amérique, en 2006, constituent de parfaites illustrations de l’intrication d’Israël dans la stratégie occidentale.

De la vacuité géographique : Un peuple sans terre pour une terre sans peuple

Le Foyer National Juif s’est déployé en Palestine, précisément, et non à Madagascar ou en Argentine comme cela était prévu dans le projet originel pour l’évidente raison que la mise en place de cette entité occidentale au cœur du Monde arabe répondait avant tout à un géotropisme permanent des puissances coloniales :

Le verrouillage de l’espace arabe au prétexte de la liberté de navigation et de la sécurité de la route des Indes : Gibraltar, le Canal de Suez, l’île de Massirah, la côte des pirates auront ainsi tout au long de l’histoire moderne constitué autant de jalons de l’expansion européenne, autant de places fortes de garnison et de vigiles de l’Empire britannique.

L’implantation du Foyer National Juif en Palestine a été précédée de la conquête de l’Algérie, en 1830, du protectorat de la France sur la Tunisie, en 1881, du protectorat anglais en Égypte, en 1882. Elle est concomitante du Mandat français sur la Syrie et le Liban, en 1920 et du Mandat anglais sur l’Irak et la Palestine.

Soixante dix ans après l’indépendance des pays arabes, au lendemain de la Deuxième guerre mondiale, la présence militaire occidentale est plus forte qu’à l’époque coloniale.
L’ensemble arabo-musulman est ainsi enserré dans un maillage, sans doute l’un des plus denses au monde. Qu’on en juge : le Qatar abrite la base du centcom, la plus importante base américaine du tiers monde dont la zone de compétence s’étend de l’Afghanistan au Maroc et le Bahreïn le QG de la V me flotte américaine opérant dans la zone Golfe-Océan indien.
Zone de pré positionnement des troupes américaines dans le golfe, le Koweït sert de base arrière pour le ravitaillement stratégique des troupes combattantes américaines dans la zone.

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L’Arabie saoudite abrite sur la base du prince sultan, -dont la superficie excède la superficie de Paris, les avions radars Awacs-, et le Maroc, la base aérienne de Kénitra pour la surveillance aérienne depuis la rive arabe du passage de Gibraltar. Enfin le Sultanat d’Oman, sur l’île de Massirah relevant de sa souveraineté, une base aéronavale anglaise verrouille la jonction Océan Indien-Golfe arabo-persique.

Au passage, relevons que la quasi-totalité des monarchies arabes se trouvent en situation de subordination ou, pour être charitable, de « servitude volontaire » vis-à-vis des puissances occidentales. L’importance de l’implantation du Foyer National Juif en Palestine apparaît rétrospectivement ainsi comme un élément du maillage.

Le choix de la Palestine s’est fait en vertu du principe de la vacuité géographique. L’habillage idéologique à cette entreprise de prédation se résumait par ce slogan « Un peuple sans terre pour une terre sans peuple». Un slogan mystificateur car il revenait à nier l’existence d’une population dont les ancêtres s’étaient frottés victorieusement aux Croisés, en Palestine.

Nier l’existence d’une civilisation, marquée par une économie agricole réputée pour son huile, ses vins, le vin de Latroun, ses agrumes, les oranges de Jaffa célèbres dans l’ensemble de la Méditerranée, bien avant la fertilisation du désert par les vaillants Kibboutznik, autre mystification de la légende sioniste.

Les diverses déclinaisons de la notion de vacuité

La notion de vacuité s’est depuis lors déclinée dans toutes ses variantes. De la vacuité géographique nous sommes ainsi passés à la vacuité culturelle puis à la vacuité politique.
-La vacuité culturelle : La Palestine a été décrétée en situation de vacuité par application de la théorie de Metternich « le Res Nullus » , tout simplement parce qu’elle a eu la mauvaise idée de se situer du mauvais côté de la frontière et de l’imperium européen :
« En dehors des frontières de la civilisation, il était loisible d’insérer librement, au milieu des populations plus ou moins arriérées -et non contre elles- des colonies européennes qui ne pouvaient être que des pôles de développement», expliquera benoîtement le chancelier autrichien.
Autrement dit, la Palestine n’était pas un territoire vide démographiquement, mais culturellement, vide d’une sorte de vacuité culturelle, car ne répondant pas au standard européen. Près de cent ans plus tard, l’Irak était, à son tour, frappé de « vacuité politique », qu’il importait de lui appliquer la démocratie américaine, avec les déplorables conséquences que l’on constate quotidiennement sur le terrain.

La vacuité politique ou La négation de l’identité palestinienne

La théorie de la vacuité palestinienne s’applique d’ailleurs d’une manière discontinue depuis 1948 sur le plan politique.

L’absence de progrès dans la recherche de la paix a toujours été imputée à l’absence de volonté de paix chez les Arabes, ce qui a été vrai un certain temps, mais qui n’est plus vrai depuis 1982 (adoption du plan de Fès-Maroc), et surtout à l’absence d’interlocuteurs palestiniens, ce qui n’a jamais été vrai.

Des « animaux à quatre pattes », selon l’expression de l’ancien premier ministre Golda Meir, aux « cafards » d’Avigdor Liberman, le chef de file de la droite radicale, les Palestiniens ont rarement été identifiés pour eux mêmes, pour ce qu’ils sont, des Palestiniens, les habitants originels de la Palestine.
Quand ils n’étaient pas qualifiés de « terroristes », ils ont été tour à tour, arabes israéliens ou habitants des territoires (lesquels ?) ou alors, selon leur appartenance communautaire ou ethnique (druzes, bédouins) jamais arabes palestiniens ou tout simplement palestiniens.

La négation de l’identité palestinienne a trouvé son illustration la plus achevée avec la mise en résidence forcée de Yasser Arafat, Président démocratiquement élu de la Palestine et Prix Nobel de la Paix, par le dirigeant israélien le plus controversé pour ses pratiques terroristes, le premier ministre Ariel Sharon avec la complicité des pays occidentaux. En revanche, les tortuosités israéliennes relèvent elles du registre de la générosité.

Tout le monde se souvient des « offres généreuses » d’Ehoud Barak, le prédécesseur de Sharon, lors des négociations israélo-palestiniennes de Way Plantation sous l’égide du président Bill Clinton.
La mystification des « offres généreuses » n’a pas tenu longtemps car elle a été vite dénoncée par des journalistes israéliens eux-mêmes, puisqu’elles consistaient à obtenir de Yasser Arafat une reddition sans condition tant sur le statut futur de Jérusalem que sur le statut des réfugiés palestiniens, que sur leur Droit au retour).

La promesse Balfour est en fait une promesse faite, le 2 novembre 1917, par le ministre anglais des Affaires étrangères Arthur James Balfour à Lord Walter Rothschild d’aménager un « Foyer National Juif en Palestine».
Arthur Koestler, un écrivain nullement suspecté d’antisémitisme, en tirera un accablant constat qui se passe de commentaires : « Pour la première fois dans l’histoire, écrira cet auteur hongrois anticommuniste philo sioniste, « une nation promet solennellement à une autre (nation en gestation) le territoire d’une troisième nation».
Une fraction de la Palestine est promise aux Juifs non pour les dédommager des atrocités commises à leur égard par les Palestiniens ou les Arabes, mais en compensation des persécutions qu’ils ont eu à subir en Europe. En somme, comme cela se dit vulgairement, c’est à dire dans le langage populaire, « on les dédommage sur le dos de la bête».

Plus cruellement, l’Occident chrétien a pensé purger son passif avec le judaïsme et lui témoigner sa solidarité expiatoire en créant l’état d’Israël en vue de normaliser la condition juive diasporique dans des composantes nationales claires (Abraham B. Yehoshua).

Mais il a dans le même temps transmuté son contentieux bimillénaire avec une religion longtemps considérée comme « déicide » en un conflit israélo-arabe et un conflit islamo-judaique, en négation avec la symbiose andalouse. Ce faisant, l’Occident a transféré en terre arabe les problèmes lancinants de l’antisémitisme récurrent des sociétés occidentales.

L’histoire du Monde arabe contemporain demeurera incompréhensible à quiconque ne prendra en considération la blessure originelle représentée par l’implantation de l’état d’Israël en Palestine tant il est vrai que de toutes les grandes dates qui jalonnent l’Histoire des Arabes, la date du 15 Mai 1948, est sans doute la plus traumatique.

La rupture du continuum stratégique du Monde arabe

Au-delà des considérations bibliques, la création d’une entité occidentale au cœur du Monde arabe à l’intersection de sa rive asiatique et de sa rive africaine, scellait la rupture définitive de la continuité territoriale de l’espace national arabe, la rupture du point d’articulation entre la voie continentale et la voie maritime de la « Route des Indes », la voie marchande des caravanes reliant le couloir syro-palestinien à son prolongement égyptien, une rupture stratégique du continuum au point de confluence des voies d’eau arabes (le Jourdain, le Yarmouk, le Hasbani et le Zahrani) et de ses gisements pétroliers, source de sa richesse, de son décollage économique et de sa puissance future.

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Un choc à tous égards traumatique. Il sera vécu à juste titre comme tel, comme une amputation du patrimoine national, une spoliation de l’identité arabe. Il conditionnera durablement la relation du Monde arabe et de l’Occident à l’époque contemporaine et explique une large part de sa nature conflictuelle, de ses dérives successives, de ses déflagrations répétitives, et, enfin dernière et non la moindre des conséquences, l’aversion révulsive et la méfiance instinctive que continue de nourrir le camp arabe face à toute initiative occidentale.

Découplage Golfe Méditerranée : la paix comme appât à la caution arabe d’une politique belliciste occidentale

Au delà de la théorie du vacuum, la stratégie occidentale a toujours cherché à opérer un double découplage :

  • Découpler la zone du golfe de la zone méditerranéenne du monde arabe, c’est-à-dire la zone d’abondance repue et docile de la zone de pénurie, découpler sa chasse gardée pétrolière de la turbulence de la démographie frondeuse de la Méditerranée.
  • Découpler les problèmes du golfe arabo-persique du conflit israélo-arabe, utilisant le règlement de la question palestinienne comme un appât pour obtenir une caution arabe à sa politique belliciste à l’égard du monde arabe, quand bien même elle a, elle-même, pris l’initiative de subordonner le règlement du problème palestinien au règlement des problèmes plus généraux du Moyen-Orient.
  • La conférence de Madrid, en 1991, s’est tenue, en novembre-décembre 1990, dans la foulée de la première guerre contre l’Irak. Une belle parade diplomatique sans lendemain. La première percée significative sur la voie de règlement du conflit israélo-palestinien a eu lieu avec les accords d’Oslo, en 1993.

Elle a pu se produire car elle a été opérée, en catimini, entre Israéliens et Palestiniens, à l’insu des impératifs de la diplomatie américaine, non par un élan de générosité israélienne à l’égard des Palestiniens mais pour la simple raison que le premier ministre israélien de l’époque Yitzhak Rabin était parvenu à la conclusion, au terme de la première Intifada, que ce conflit de basse intensité, saignait l’économie israélienne en une lente hémorragie, altérait l’image d’Israël, alors que l’occupation pervertissait la moralité de la jeunesse israélien.

Les accords d’Oslo prévoyaient la constitution d’un État palestinien dans un délai de cinq ans. La feuille de route de George Bush, lancée en 2003 dans la foulée de l’invasion américaine de l’Irak, prévoyait, elle aussi, l’édification d’un État palestinien dans un délai de cinq ans, c’est-à-dire en 2008. Le dernier forcing de Condoleeza Rice au Moyen-Orient, trois voyages au premier trimestre 2007, vise à soulager la pression anti-américaine sur l’Irak.

Le péril chiite : L’objectif de diversion de la diplomatie occidentale

Entre temps, la diplomatie occidentale s’est fixée un objectif de diversion :

  • Combattre le péril chiite, suscité par les Américains en décapitant les deux adversaires idéologiques -et sunnites- de l’Iran chiite révolutionnaire, les Talibans, en Afghanistan, en 2001, et l’Irak baasiste et laïc de Saddam Hussein, en 2003.
  • Combattre la menace nucléaire iranienne suscitée par la prépondérance militaire israélienne et son hégémonie régionale du fait de sa possession de l’arme atomique et son refus de se soumettre aux contrôles prévus par le Droit International quand bien même l’Iran est devenue une puissance régionale redoutée non pas tant sous l’effet d’une politique volontariste, mais par effet d’aubaine consécutive à la politique erratique américaine.

L’Islam sunnite, sous l’égide du président égyptien, Gamal Abdel Nasser, puis de Yasser Arafat, chef de l’Organisation de Libération de la Palestine, a été diabolisé lorsqu’il s’est identifié au combat nationaliste arabe pour la restauration des Droits Nationaux Palestiniens. Nasser comme Arafat ont été traités d’ « Hitler » par les médias israéliens et leurs alliés occidentaux, alors que les Chiites sous l’autorité du Chah d’Iran étaient cités en modèle de modernité et d’intégration occidentale.

Alors que l’équation se retourne, les dirigeants arabes sunnites, affidés de l’Occident, se voient gratifiés d’un vocable qui se veut flatteur « l’axe de la modération », quand bien même figurent au sein de cette alliance certains des dirigeants les plus rétrogrades de la planète.

C’est Israël qui a introduit la course aux armements atomiques au Moyen Orient et cela depuis cinquante ans et c’est l’Iran qui constitue l’unique danger nucléaire de la zone.
Ce sont quinze Saoudiens qui participent aux attentats aériens du 11 septembre 2001 contre des objectifs américains et c’est l’Irak baasiste et laïc qui est soupçonnée de connivence avec l’organisation fondamentaliste sunnite Al Qaida, quand bien même il est de notoriété publique que l’ordonnateur des attentats du 11 septembre 2001 est le poulain commun des Saoudiens et Américains, Oussama Ben Laden.

Cette drôle de logique illustre le discours disjonctif occidental à l’égard du monde arabo-musulman, une logique variable en fonction des intérêts des occidentaux. Un discours qui explique largement les déboires occidentaux en terre arabe.

Au passage signalons, qu’Israël est le seul état du Monde à vouloir désigner au préalable ses interlocuteurs, en délimitant au préalable l’ordre du jour, en anticipant, au préalable, ses propres résultats, sans que cette morgue ne suscite la moindre critique dans les cercles dirigeants occidentaux, plongés dans une sorte de léthargie amnésique pour tout ce qui concerne le problème palestinien.

Au delà de la diversité des composantes de la fédération américaine, l’Amérique s’est dotée par la force d’un état fédéral de cinquante états -« les États-Unis d’Amérique »- et cherche à s’adjoindre le Canada et le Mexique au sein de l’ALENA, l’Europe, à son tour, s’applique à édifier une Union Européenne de 27 membres, mais tant l’Amérique que l’Europe veillent à maintenir le monde arabe dans un état de balkanisation.

Le bloc atlantiste répugne à la constitution d’un ensemble arabe au nom du particularisme des diverses composantes du Monde arabe (sunnites, chiites, druzes et alaouites, kurdes et arabes, chrétiens et musulmans, Machreq et Maghreb, arabes, kabyles), alors que cet ensemble de près de 400 millions de personnes représente davantage de similitude culturelle et linguistique qu’un plombier polonais et un pécheur maltais ou qu’un résident de l’État huppé du Massachusetts et un texan de San Antonio, ou encore qu’un basque et un breton.

Les Occidentaux s’acharnent ainsi à vouloir appliquer vigoureusement la légalité internationale au Monde arabe, tout en s’exonérant de cette obligation envers Israël, un état « hors la loi », sur le plan international, du fait de son propre comportement, détenteur d’un record mondial absolu des résolutions de l’ONU non respectées par l’État hébreu. Pas moins d’une quarantaine.

Pour aller plus loin sur ce sujet

La liste des résolutions de l’ONU non respectées par Israël http://www.monde-diplomatique.fr/2009/02/A/16775

L’Amérique veut imposer par la force la démocratie dans le Monde arabe, mais n’en tire pas toutes les conséquences lorsque les résultats d’un scrutin démocratique lui sont défavorables.
Elle récuse le Hamas au prétexte qu’il ne reconnaît pas Israël, mais ne souffle mot ni des assassinats extrajudiciaires des dirigeants palestiniens (160 en quatre ans), illégaux au regard du Droit international, ni de l’annexion rampante de la Cisjordanie et du Golan syrien, ou de la judaïsation de Jérusalem, ou enfin du blocus quasi permanent aux populations palestiniennes sous occupation israélienne

Rappel à l’ordre des circonvolutions des divers plans de paix

Le « Plan de partage » des Nations unies aux Palestiniens proposait 47% des 100% du territoire de la Palestine du mandat britannique qui appartenait aux Palestiniens à l’origine. Puis par une sorte de réduction successive, toutes les autres initiatives de paix proposaient des plans dégressifs :

  • Les « Accords d’Oslo » (1993) proposaient aux Palestiniens une superficie réduite de moitié : 22% des 100% qui leur appartenaient à l’origine.
  • L’« Offre généreuse » d’Ehoud Barak aux Palestiniens, réduisait l’offre à sa portion congrue : 80% des 22% des 100% de votre territoire d’origine.
  • La « Feuille de route » envisagée par Bush pour les Palestiniens en vue d’obtenir la caution arabe à la guerre contre l’Irak soumet la création d’un État palestinien à diverses conditions qui constituent un chef d’œuvre d’hypocrisie diplomatique et de mauvaise foi.
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La création d’un État palestinien est soumise aux conditions suivantes :

  • La renonciation à la lutte armée, c’est-à-dire la résistance à l’occupation, ainsi que la neutralisation de tous les combattants et leur démobilisation
  • La renonciation au Droit au retour des réfugiés vers les maisons de leurs ancêtres
  • La désignation de représentants politiques agréés par les États-Unis et Israël
  • L’acceptation des faits accomplis sur le terrain notamment la séparation de la Cisjordanie de Jérusalem via le Mur de Sharon, ainsi que les routes de contournement militaire des agglomérations palestiniennes, réservées à l’usage exclusif des Israéliens. Ce dispositif brise la continuité territoriale palestinienne, de la même manière que l’État d’Israël avait brisé le continuum stratégique arabe
  • La renonciation à Jérusalem pour capitale
  • La modification des programmes scolaires dans un sens agrée par les Américains et les Israéliens.
  • L’instauration d’un planning familial et de la limitation des naissances en vue de brider la démographie galopante des Palestiniens

La satisfaction de ces sept conditions pourrait ouvrir la voie à la constitution d’un état palestinien au terme de négociations avec les Israéliens qui porteraient sur 80% des 22% des 47 % du territoire palestinien d’origine.

Cent ans après Balfour, le Mouvement National Palestinien dans l’impasse

Un quart de siècle après les accords israélo-palestiniens d’Oslo, le Mouvement National Palestinien est dans l’impasse et sa refondation sur une base révolutionnaire s’impose comme une question de survie, sous peine de dépérissement.

Ayant accédé aux responsabilités suprêmes par défaut, par suite de l’élimination des principaux dirigeants palestiniens par les services israéliens, notamment Abou Djihad, chef de la branche militaire de la centrale, et Abou Iyad, chef des services de renseignenemt, Mahmoud Abbas apparaît comme président par défaut d’une République bananière.

Captif de la puissance occupante, sans charisme, discrédité par l’affairisme de son entourage, président d’une « République Bananière » sous contrôle rigoureux de son ennemi israélien, Mahmoud Abbas, est néanmoins partisan d’une coopération sécuritaire avec l’État Hébreu.

Sa présence à la tête de l’Autorité Palestinienne est perçue comme « le moindre mal », par ses parrains occidentaux, trop heureux de cet abcès de fixation, oubliant que « politiquement, la faiblesse de l’argument du moindre mal est que ceux qui choisissent le moindre mal oublient très vite qu’ils ont choisi le mal » (Hannah Arendt (Responsabilité et Jugement).

Le Mouvement National Palestinien est l’unique Mouvement de Libération Nationale au Monde à avoir commis deux fautes stratégiques à l’effet de le projeter dans une impasse tragique, au point de dénaturer son combat, en dépit d’un lourd tribut payé à la reconnaissance de la légitimité de sa cause, en dépit du bien fondé de sa revendication.

1ère faute : La renonciation à la lutte armée de l’OLP

La renonciation à la lutte armée avant la satisfaction de ses objectifs nationaux, autrement dit la répudiation guérilla, la marque de fabrique des guerres de Libération, un des fondements du combat national, a constitué la première faute majeure, rendant le mouvement palestinien captif de l’agenda des parrains d’Oslo, les États-Unis.

2e faute : La dérive stratégique du Hamas lors de la guerre de Syrie (2011-2017)

La décision du Hamas de privilégier une alliance avec les pétromonarchies, sur une base sectaire, en reniant ses anciens frères d’armes, -la Syrie, l’Iran et le Hezbollah libanais, pourtant artisans de sa propulsion militaire-, a constitué une dérive rarissime dans les annales des guerres de libération nationale, en même temps qu’un acte d’ingratitude absolu mettant en question la crédibilité politique du mouvement et la pertinence de son appréciation des rapports de force régionaux.

Cette aberration idéologique explique la suspicion et la perplexité que le Hamas projette parmi les nombreux sympathisants de la cause palestinienne à travers le Monde.

Suprême infamie : L’Arabie saoudite a capitalisé une rente de situation sur une position maximaliste à connotation antisémite sur le conflit israélo-arabe, au cours du premier demi siècle de son existence, pour finir par détourner les combattants vers l’Afghanistan, à cinq mille km du champ de bataille de la Palestine, dans la décennie 1980 ; par une instrumentalisation de l’islam contre arme de combat contre l’athéisme soviétique, avant de basculer, pour la survie du trône wahhabite, vers une normalisation rampante avec Israël, à la mesure de l’annexion rampante de la Palestine par l’État Hébreu, pour la survie du trône wahhabite au prétexte de combattre l’Iran schismatique chiite.

Pour toutes ses raisons, il m’a paru nécessaire de vous offrir cette lecture en contrechamp de l’Histoire de la Palestine tant il est vrai que le passé éclaire très cruellement le présent, et sans doute l’avenir, qu’il est tout aussi vain de vivre dans la pénombre et la périphrase, et, d’admettre enfin, et là je m’adresse aux amis de l’état hébreu qui se déclarent attacher à son existence, qu’Israël ne connaîtra une légitimité que lorsqu’il aura été pleinement reconnu par sa victime, les Palestiniens, librement, souverainement, sans condition préalable.

Les Occidentaux soutiennent le droit à la sécurité d’Israël et le Droit à l’existence du peuple palestinien, sans l’assortir de considérations sur sa sécurité.

À en juger par les multiples actions préventives menées par Israël au cours de son histoire, l’équation vraie, le bon droit, consiste à réclamer non un droit à la sécurité d’Israël et un devoir d’insécurité pour les pays arabes, mais un droit égal à la sécurité pour l’ensemble des pays de la zone, y compris la Palestine, car il est tout aussi légitime pour Israël que pour les pays arabes de disposer d’un droit égal à la Sécurité.

Souvenons nous, in fine, que tant qu’existe un revendicateur un Droit ne se perd pas et une fausse symétrie ne sert pas une bonne administration de la justice.

Pour aller plus loin

http://www.madaniya.info/2017/10/12/mouvement-national-palestinien-limpasse-refondation-base-revolutionnaire-question-de-survie/
http://www.madaniya.info/2017/10/16/les-deux-fautes-strategiques-majeures-du-mouvement-national-palestinien/

Références bibliographiques
  • « Israël, fait colonial ?» Maxime Rodinson, Revue des Temps Modernes N°253 bis/Mai 1967, pages 17-88.
  • « Israël et le refus arabe ?»  Maxime Rodinson, Seuil.

Ces deux ouvrages sont épuisés.

Pour une plus grande documentation sur la question

  • « Le Sionisme contre Israël » par Nathan Wienstock- Éditions François Maspero 1968, épuisé.
  • « Le Proche-Orient éclaté » (1956-2006) Georges Corm Folio/Histoire N°93.
  • Mythes et réalités du conflit israélo-palestinien, Norman Finkielstein, préface de Dominique Vidal- Éditions Aden. Colloque Caen- 24 Octobre 2007.