29 oct. 2017
En tournée politique en Corée du Sud pour dix jours de rencontres et conférences, en tant qu’élue de la région Auvergne-Rhône-Alpes, je me suis rendue, dimanche 29 octobre, à la base militaire américaine de Pyongtaek où Donald Trump a annoncé sa venue dans une semaine.
Près de 30.000 soldats américains sont présents en Corée du Sud. Les bases militaires sont considérées comme territoire américain et les États Unis peuvent y effectuer des tests ou y importer des armes de destruction massive sans possibilité de contrôle des autorités sud-coréennes. Ce sont également, par l’accord SOFA, les États Unis qui prennent le contrôle opérationnel de l’Armée sud coréenne en temps de guerre.
Ajoutez à ça le tragique accident de deux écolières écrasées par un blindé américain en 2002, une fuite de bacille de charbon actif (qui provoque l’anthrax) en 2015, des circuits organisés de prostitution et des cas relatés de violences sexuelles de militaires américains sur les habitantes, comme à Okinawa au Japon, et vous aurez une petite idée de la colère et du sentiment de perte de souveraineté de la population. Ici, après celle du Japon, on parle d’occupation américaine.
Dans ce contexte, l’aggravation des tensions par Donald Trump, ses propos outrancièrement guerriers et son intention affichée d’installer des armes nucléaires actives sur le sol sud-coréen sont très mal reçus. À Séoul une importante manifestation a eu lieu le 28 octobre, après l’annonce de sa venue en Corée du Sud le 7 novembre, sous le slogan « No war ! No Trump ! ». Ce même jour, les sud-coréens célébraient le premier anniversaire de la Révolution des bougies, qui a conduit quelques mois plus tard à la destitution de la présidente corrompue Park Geunhye le 10 mars 2017.
La plus grande base américaine en Corée du Sud se trouve à Pyongtaek. C’est la base K55, avec ses 7000 soldats, baptisée Osan et officiellement domiciliée pour la Poste en Californie. C’est le « hub militaire » des États Unis en Corée du Sud et pour toute la région qui ne cesse de s’agrandir, grignote les champs de riz et évacue les maisons alentour. À deux pas de la rivière et de ses pêcheurs, des sentinelles de l’environnement observent la base au téléobjectif.
L’institut pour la réappropriation de la base redoute les rejets toxiques dans le fleuve comme ceux qui ont eu lieu à la base américaine de Séoul et ont conduit à la condamnation exceptionnelle d’un soldat américain à 3 ans de prison en 2003. A Chilgok, un autre soldat a révélé que des stocks d’agent orange avaient été enfouis dans la base. A Pyongtaek, ce sont des malaises provoqués par les ondes électromagnétiques du radar qui ont été enregistrés. Ailleurs, ce sont 70 vaches mortes d’un coup sans explication, à 4 kilomètres de la base. Les installations ne pouvant être contrôlées, et aucune information n’étant divulguée, la méfiance et la peur sont fortes.
Base K55, c’est ici qu’ont lieu la plupart des exercices conjoints, les vols de reconnaissance, les importations de missiles, les surveillances de télécommunications en Corée du Nord. C’est ici que le président américain a prévu de venir. Il doit se rendre depuis cette base en hélicoptère jusqu’à la base de Yongsan installée en plein Séoul. L’association des habitants qui se mobilise depuis depuis 474 jours devant la base pour demander des excuses officielles du gouvernement américain sur l’introduction du bacille de charbon actif, demande également le retrait des bases militaires américaines de Corée du Sud et un traité de paix entre la Corée du Nord et les États Unis.Il est assez peu probable que la visite de Donald Trump aille dans ce sens.
Corinne MOREL DARLEUX,
Pyongtaek, 29 octobre 2017.