Par Olivier Delorme
4 juin 2018
La presse aux ordres commence à se gargariser de perspectives de records battus, pour la prochaine saison, des entrées touristiques en Grèce.
D’abord, il faudrait commencer par arrêter de crier victoire sur des “prévisions” : voilà au moins vingt ans que les prévisions de hausse du PIB sont systématiquement démenties. Voilà des années qu’on annonce un retour à la croissance de la Grèce jamais vérifié. Les 1,2 % de croissance de 2017 sont évidemment une plaisanterie, s’ils ne sont pas le simple résultat d’une manipulation statistique. Ils ne sont dus qu’à des rattrapages conjoncturels après sept ans de déflation continue et une évaporation de 25 à 30 % du PIB, conjugués à l’effet retard d’une baisse du taux de change de l’euro pendant plusieurs mois sous 1,10 dollar. Mais depuis l’asphyxie a repris avec la remontée de l’euro.
Deuxièmement et surtout, l’augmentation du nombre des entrées touristiques en Grèce n’a rien d’une bonne nouvelle. Parce que le tourisme, en Grèce, depuis dix ans, a profondément changé de nature et que cette augmentation du nombre des entrées est surtout due au développement du “all inclusive” forme de tourisme coloniale qui ne profite ni à la Grèce ni aux Grecs.
Le tourisme, comme le reste, a en effet changé de mains en Grèce.
Il ne rapporte plus aux Grecs, qui touchent des salaires de misère, notamment dans l’hôtellerie. Il rapporte aux étrangers qui se sont emparés, à la faveur de politiques imposées par la Germano-Europe, des infrastructures aéroportuaires, et bien souvent hôtelières.
Je ne parle même pas du centre ville d’Athènes où la colonisation par les “investisseurs” étrangers qui rachètent pour rien les biens que les Grecs sont obligés de vendre pour survivre ou qui sont confisqués, avec derrière une généralisation eu Airbnb qui chasse les Grecs vers la périphérie.
De même, la généralisation du “all inclusive” fait que les recettes du tourisme sont délocalisées dans les pays de départ, seule une part minime de ces recettes consacrées aux salaires de misère et aux prestataires de service grecs écrasés par les groupes multinationaux vient en Grèce. En revanche, les touristes “all inclusive” ne font plus fonctionner l’économie locale – bars, restaurants, pâtisseries, puisque, pour l’essentiel ils consomment à l’intérieur de leur établissement et plus au dehors. C’est un tourisme de type colonial.
Ce tourisme détruit l’environnement et les côtes par la monstruosité des infrastructures qu’il nécessite, alors que le tourisme traditionnel en Grèce était souvent de nature familiale et irriguait l’économie locale en apportant un revenu de complément. Ce “nouveau” tourisme qui fait battre des records d’entrée, au contraire, bétonne les espaces et exploite les hommes.
Il contraint aussi l’Etat et les collectivités grecs à assumer un coût croissant de l’accueil de ces touristes : épuisement de ressources rares en eau, pollutions, épuration, traitement des déchets…
Ce record d’entrées ne serait donc nullement une bonne nouvelle ni pour l’économie grecque de plus en plus colonisée, ni pour l’environnement, ni pour la Grèce – assignée par l’Eurogermanie au rôle de bronze-cul de l’Europe – ni encore moins pour les Grecs. Ce record d’entrées n’est donc une bonne nouvelle ni pour l’économie grecque de plus en plus colonisée, ni pour l’environnement, ni pour la Grèce ni encore moins pour les Grecs.