L’élection présidentielle marque un tournant dans la vie politique française. Une nouvelle page s’est ouverte, il reste à l’écrire !
Nous vivons une situation paradoxale, jamais autant qu’aujourd’hui la crise du capitalisme mondialisé n’a été autant synonyme de régressions, d’inégalités, de menaces, de violences dans tous les domaines. Le bilan des gouvernements de droite comme de « gauche » est de ce point de vue accablant. La faillite de l’Euro et de l’union Européenne a débouché sur un désastre social ! Enfin les menaces de nouvelles guerres sont à nos portes.
Or nul ne peut prétendre qu’une amélioration est en vue ! Par contre tout le monde s’accorde à dire que la situation va encore s’aggraver, les conflits se multiplier ! Voilà pourquoi il n’y a rien à attendre des programmes de Macron ou Le Pen. Ils ne produiront que du sang et des larmes par le recours à un autoritarisme de plus en plus brutal. Cela se fera au prix des libertés de chacun, de chacune et de tous. Hollande et le Parti socialiste auront contribué. Ils auront fait le lit d’un fascisme rampant qui gangrène toute la société !
Le paradoxe c’est que dans le même temps l’exigence de changement véritable s’exprime de nouveau avec force. Sa traduction sociale s’est manifestée dans le printemps de la colère de 2016 et depuis, sa traduction politique s’est exprimée entre autre avec le résultat acquis par le candidat de « la France Insoumise ». Même avec les limite du programme de Jean-Luc Mélenchon il y a eu à cette occasion une volonté de rupture, l’expression d’une résistance à l’ordre ancien des choses, une rébellion.
Il est significatif que cette dynamique a mobilisé des dizaines de milliers de jeunes, d’ouvriers, d’employés qui pour la première fois ont fait le choix de voter, ce qu’ils n’avaient pas fait souvent depuis de nombreuses années. Ceci est porteur d’espoir.
Ce sentiment s’exprime dorénavant avec force dans la jeunesse, chez les travailleurs en lutte, à travers les mouvements d’émancipation.
Dan cette situation il est donc normal que le peuple soit a la recherche d’issues, d’alternatives. Que cela se fasse parfois dans la confusion ne change rien au fait que c’est là une réalité visible, palpable. Il faut s’en féliciter. Il faut l’encourager. Il faut expérimenter avec audace sur tous les sujets qui intéressent la vie des gens.
Pour certains ce changement d’état d’esprit est une évolution inattendue. Elle les laisse désarmé ou les paralyse, pourtant la conscience grandit quant à la malfaisance de ce système qui ne fonctionne plus! Pour d’autres c’est là une menace qu’il faut absolument contenir et juguler car elle menacerait le système lui même. A l’évidence on n’en a pas terminé avec la contradiction capital/travail.
Il est donc faux de prétendre comme le font les médias serviles et les politiciens que l’enjeu des élections présidentielles se réduirait dorénavant entre démocratie libérale ou aventure fascisante, entre mondialisme ou chauvinisme, entre tolérance ou intolérance. En fait les deux candidats n’entendent nullement remettre en cause le système existant et encore moins critiquer ses tares ou ses alliances. Pour eux le capitalisme demeure l’horizon indépassable, la recherche du profit par la domination et l’exploitation reste le dogme intangible, l’abdication de notre souveraineté et de notre indépendance est devenu un point de non retour.
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Voilà pourquoi le seul et unique objectif qui doit nous déterminer pour cette élection ce n’est pas qui de Macron ou Le Pen sera élu, mais c’est de comment contribuer à mettre à bas un système inhumain et criminel soumis a l’appétit gargantuesque des riches et des puissants dont les deux acolytes sont les représentants.
Pourquoi dans ces conditions faudrait il se laisser aller à la panique, ou se laisser impressionner par la pression médiatique et les appels a soutenir l’un ou l’autre. Au fond ils ne sont que des comparses, des duettistes qui ont en commun d’entretenir réciproquement leur fond de commerce dans une fausse opposition.
Passez moi la rhubarbe je vous passerai le séné. La pantalonnade de l’affaire Whirlpool et le chassée croisé des candidats à de ce point de vue atteint le summum de la caricature. Elle a renvoyé les deux compères à la société du spectacle dont tous les deux sont issus. Ils ont laissé les travailleurs en lutte là ou ils en étaient. Aujourd’hui comme hier ces derniers ne peuvent compter que sur eux mêmes et sur la solidarité de classe qui doit les entourer.
Participer à cette fausse démocratie qui cherche à obliger le peuple à choisir entre de fausses solutions relève de la mystification ! C’est disons le : une escroquerie, pour ne pas dire que c’est une farce.
Quand la responsabilité serait d’éclairer, il est affligeant et pathétique de voir au sein de la « gauche » les dirigeants du PCF se faire les artisans de cette mascarade à travers leur « Appel » qu’ils ont réitéré à voter Macron.
Par ailleurs il faut rappeler qu’ils n’ont guère brillé dans leur engagement pour permettre de créer les conditions d’une victoire. Ils se sont même employés comme disait Lampedusa à « ce que les choses changent pour qu’elles restent identiques ». Leur soumission, leur passivité participe de cette impasse dans laquelle on cherche à entrainer le peuple pour le piéger et lui interdire le droit à un changement véritable.
Il faut en tirer les conséquences. Le PCF est devenu un parti qui fait obstacle à un changement radical de la société.
Par conséquent si la France n’est pas menacée par Le Pen ! Il est par contre une évidence : la poursuite et l’aggravation des politiques ultra libérales de Macron vont logiquement et naturellement alimenter le fond de commerce du Front National. Les mêmes causes produisent toujours les mêmes effets.
Car au fond c’est bien ceux de gauche comme de droite qui aujourd’hui soutiennent Macron en sachant qu’il va et qu’il doit organisé le recul social, la désindustrialisation économique au bénéfice de la finance, l’abandon de ce qui reste de notre souveraineté afin de défendre au mieux les intérêts mondialisés du capital, poursuivre le démantèlement des acquis sociaux y compris ce qui fait la singularité française. Dans le domaine de la culture il n’y aura plus plus d’exception française puis que selon Macron l’art et la création française n’existe pas.
Voyons les choses en toute lucidité et sans détours. Car pourquoi et au nom de qui devrait on avaler cette couleuvre du vote en faveur de Macron comme une nécessité incontournable ? Rien n’y oblige !
Le meilleur moyen d’agir, de manière positive et efficace ce n’est pas de se de se refugier dans le ralliement béat ou l’attentisme, mais de prolonger son vote avec l’objectif de poursuivre la construction d’un mouvement plus large encore. Comment ? Mais par l’abstention massive et militante le 7 mai.
Il faut délégitimer de façon combative ces deux candidats dont l’un est présenté comme déjà élu et qui d’ailleurs se comporte comme tel. Il faut donner plus de force encore au vote blanc et nul qui a été le 23 avril sensiblement supérieur au résultat du candidat arrivé en tète .C’est à dire Macron.
Si le système bi partisan qu’a connu la France a vécu sous la forme qui était la sienne les mêmes intérêts qu’ils représentaient, eux perdurent. C’est toujours la confrérie des privilégiés de la fortune, la corporation des nantis qui défendent l’association capital/travail qui mènent le jeu.
Il suffit de consulter la liste des parrains de Macron pour être édifié : patrons milliardaires, dirigeants du MEDEF, politiciens corrompus et failli qu’incarnent les dirigeants du PS, de la droite et même du PCF, dirigeants de la CFDT, chiens de garde intello-médiatisé, ralliés de la 25e heure, et jusqu’aux représentants de la sainte alliance du libéralisme mondialisé de Bruxelles à Washington en passant par Berlin.
Quant au Front National comment pourrait on fermer les yeux sur ceux qui en sont les dirigeants, sur ce qui caractérise son histoire, à travers la violence, l’anticommunisme viscéral, le racisme, la xénophobie, la bigoterie, la collaboration et sa nostalgie de l’empire colonial. Une rivière de sang nous sépare.
A t’on jamais vu tous ces gens défendre l’intérêt national, la souveraineté, l’indépendance de notre pays ? Les avons nous vu combattre contre le fascisme, l’occupation étrangère, les guerres impérialistes ? Jamais !
Dans ces conditions Macron et Le Pen ou Le Pen ou Macron c’est du pareil au même, « bonnet blanc et blanc bonnet » c’est l’impasse dans laquelle on cherche à entrainer le peuple pour le piéger et lui interdire le choix critique d’une autre politique.
Il faut prendre le contre pied de ce complot, ce coup d’état politico médiatique perpétré avec les milliards de la finance internationale.
L’abstention massive, le vote nul, peuvent constitué un changement qualitatif, contribuer à redonner confiance et espoir dans l’esprit et l’idée même de résistance au Capital.
L’absentions peut devenir la démonstration que notre peuple reste mobilisé, qu’il conserve l’initiative et son libre choix, que rien ne l’oblige à en rabattre sur ses objectifs. Le vote appartient à chacun et chacune d’entre nous.
Il ne saurait être celui en faveur d’un prétendu homme providentiel qui de surcroit attend qu’on lui laisse les mains libres pour faire ce qu’il veut ! C’est à dire gouverner par ordonnances, ubériser la société, mettre en concurrence les travailleurs entre eux, ramener la retraite à 67 ans, démanteler le secteur public et supprimer des centaines de milliers d’emplois de fonctionnaires, s’aligner sur les directives de Bruxelles ou Washington.
Macron exige une adhésion à ce programme
Réactionnaire ! Soyons cohérent donnons lui déjà un avant gout de ce que seront nos résistances.
Un espace s’est ouvert, il s’agit maintenant de se donner les moyens de l’occuper pleinement et avec audace. La donne n’est plus là même , la question du pouvoir se pose dorénavant en des termes radicalement inédits et appelle un grand esprit d’initiative, une autre manière de faire de la politique en se dégageant des habitudes, des idées reçues, du conservatisme et de la confusion . Certes il ne faut rien idéaliser, mais ne pas voir qu’il existe un nouveau rapport des forces, donc des conditions plus favorables pour construire un véritable projet de changement serait prendre une grave responsabilité. Il faut encourager, soutenir l’espoir et la confiance dans la force matérielle de la bataille des idées.
Comme dans les luttes sociales ou l’action permet d’engranger des succès parfois modestes parfois des victoires, ce résultat démontrera qu’il est possible d’inverser la cour des choses, de s’unir, d’ouvrir une perspective.
Si rien n’est jamais acquis de façon définitive, rien n’est jamais perdu pour autant. Ce qui a été semé, l’expérience qui a été faite comme toujours dans les grandes batailles sociales constitue un encouragement à persévérer dans cette voie d’un combat radical qui s’attaque aux causes et à la logique prédatrice du système capitaliste.
Pour le dire clairement il s’agit de se doter d’un programme et d’un pratique sociale de façon à affaiblir les positions du capital. Il s’agit de se donner les moyens d’un vaste débat tout autant sur la stratégie que sur les contours qui devraient être ceux d’une société capable de mettre l’ensemble des ressources productives au service des besoins légitimes des aspirations des travailleurs et de leurs familles.
C’est ce que doit signifier une abstention massive le 7 mai pour ouvrir la voie à de nouvelles résistances et pour gagner. C’est le choix que j’ai fait !
Jean-Pierre Page