Les prisonnières des CRA parlent

Ces textes et témoignages sont tirés de la brochure produite par l’assemblée anti-CRA, qui intervient sur les Centres de rétention administrative et dont on peut retrouver les publications ici

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Pour les copines enfermées en CRA, c’est la double peine du racisme et du sexisme c’est-à-dire qu’en plus des violences subies par tous et toutes, elles doivent supporter d’autres « formes » de violences. Elles ont toujours pour but d’intimider et d’humilier la personne. Ça peut être des insultes liées à leur genre, de la drague non consentie, donc du harcèlement,de la part des flics, des menaces par rapport à leurs enfants. En plus du stress des conditions de vie en CRA et de la déportation, elles doivent vivre avec la possibilité et une probabilité plus élevée de se faire violer.

Au Mesnil-Amelot, en décembre, une femme enfermée s’est faite violer par un keuf du CRA. Le viol est aussi utilisé comme une punition, une forme de répression de la part des keufs. Un autre moyen de leur faire fermer leur gueule, de leur mettre la pression. Les copines avec qui on était en contact nous racontaient que face à ce viol, elles avaient décidé de résister ensemble, c’est-à-dire de rester toujours ensemble, de ne jamais se retrouver seules. Il y a souvent une grande solidarité et complicité entre les meufs au Mesnil. Elles s’échangent les produits de première nécessité comme les serviettes hygiéniques, elles s’entraident moralement, elles partagent les informations sur les résistances, sur les parloirs sauvages.

“Une mort douce”

« Par où commencer : les toilettes sont sales. Il y a des fuites d’eau dans la salle de bain. La chasse d’eau ne fonctionne pas. Le réfectoire est sale. La nourriture est immangeable. Les portes ne se ferment pas. Les lits font trop de bruit, du coup les filles dorment par terre pour pas déranger les autres. Ça sent pas bon et les couloirs sentent les égouts. Une mort douce j’appelle ça. Ils ne laissent pas les visiteurs faire entrer de la nourriture chaude.

Il y a tellement de choses à dire et à changer : maltraitance, mauvaise nutrition.

Ils ont prolongé le délai de la rétention de 45 à 90 jours.

Une communauté musulmane, ils cuisinent avec du porc et de la viande. Les retenues malades et qui ont une santé fragile ne sont pas bien prises en charge.

J’ai écrit ça étant sous Attarax, comprimé calmant.»

«Vraiment c’est avec le cœur serré que je parle de ces différentes conditions, c’est vraiment gênant de la part de la France.»

«On ne mange pas bien, des femmes avec leurs bébés et des nourrissons sont enfermées.»

«On nous traite comme des chiens et chiennes sans respect, pas de nourriture, les sanitaires sont tellement insalubres qu’on risque de se faire piquer, d’attraper des infections incurables, les policiers nous traitent comme des moins que rien alors que le sang qui circule dans leurs veines est le même sang que nous.»

«Quand on demande du papier toilette les personnes nous refusent c’est-à-dire c’est un calvaire total. Hier j’ai été à l’infirmerie pour prendre mon traitement. Il y a une infirmière raciste qui se permet de me dire que je faisais semblant de me faire mourir alors que tout le monde savait que j’avais fait une crise 3 fois depuis le début de cette histoire. Si je pouvais faire une plainte contre cette infirmière je le ferais. J’ai tellement à raconter, donc je préfère le tête à tête avec vous, j’ai vu des choses qui m’ont épatées, vraiment.»

“On a prévu de faire une grève de la faim, car on est en contact avec le centre de Vincennes”

Témoignage d’une copine prisonnière au CRA du Mesnil-Amelot retranscrit de l’émission l’Actu des luttes du 5 avril 2019

« Je suis au CRA de Mesnil-Amelot depuis 25 jours. Je me suis faite arrêter au travail, j’ai été en GAV pendant 24 heures. Puis on m’a emmené au CRA. La police n’était pas sympa, ils étaient horribles racistes, tout ce que vous voulez. Arrivée ici, comme c’était la première fois, je ne savais pas comment ça allait se passer, c’était quoi la prochaine étape. La Cimade m’a guidée un petit peu. Puis j’ai pris un avocat, je suis passée au premier jugement, j’ai été rejetée, et j’ai fait l’appel à Paris, mais personne n’est libéré à Paris, donc je n’avais pas beaucoup d’espoir quand je suis allée à Paris. Et il y a trois jours, je suis passée à Melun, et pareil j’ai été rejetée, donc j’ai décidé de rentrer chez moi. En fait, ils font tout pour nous faire craquer. Il y a des gens qui ont des santés fragiles qui ne sont pas bien traités. Il y a une femme asthmatique qui fait des crises et ils ne la prennent pas au sérieux. Elle est tombée par terre et une policière lui a dit « relevez-vous, vous faites de la comédie ». Et puis ils mettent du temps à appeler les pompiers, car ils ne veulent pas se casser la tête, ils ne veulent pas passer leur nuit à l’hôpital. Une autre dame qui se fait super mal traiter par la police, qui est une femme voilée, elle a droit à rien, si elle va devant la Cimade, elle attend une heure, deux heures, et après on lui dit que c’est fermé, pour la fouille, pareil. Et il y a les sanitaires aussi, qui sont déguelasses, les douches sont bouchées, et quand quelqu’un prend sa douche, ça sent les égouts dans le couloir. La bouffe, c’est pareil, absolument immangeable. Il y a des bébés, des enfants, des familles. Il y a même un nouveau né, ils l’ont ramené et ils ont dit qu’il allait resté ici trois mois, car il a été rejeté au JLD de Meaux. Ça c’est aberrant, c’est affreux. Il y a tellement de choses qui se passent, des gens malades, des gens perdus, qui ne savent pas parler le français, qui  ne savent même pas lire le délibéré du juge. Donc ils ne savent même pas ce qui se passe. Parfois, ils partent au tribunal, et ils n’ont pas d’interprète. […]

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Je ne sais pas pourquoi les CRA existent, pourquoi ils ramènent des gens de chez eux, du travail, ou de n’importe quel lieu, ils les ramènent ici, ils leur donnent de la merde à bouffer, et ils les traitent comme des chiens. Même les chiens ils ont une meilleure vie que les êtres humains d’ici.

Dès que je suis arrivée, on est très solidaires avec les autres filles. Elles m’ont expliqué comment ça allait se passer, ce qui se passe, comment faire. Il y a une fille qui est partie il y a pas longtemps, il lui ont fait un vol caché. Je n’ai jamais compris le principe des vols cachés. Elle a vécu toute sa vie en France, et elle voulait renouveler ses papiers. Je pense qu’elle avait déjà un OQTF, et ils l’ont ramené ici. Au bout de 19 jours, ils lui ont mis un vol, elle a refusé et le jour où elle partait à la Cimade pour contacter le ministre de l’intérieur, c’était sa dernière chance, car c’est une fille qui est venue à l’âge de 8 ans en France, elle a fait ses études ici, elle a tout fait ici. Ils l’ont pris du lit, en survêt, comme ça, et elle savait pas. Ils disent « présentez-vous avec toutes vos affaires au couloir ». C’est comme ça qu’ils font pour les vols cachés. Donc là maintenant, on connait le jeu, on sait que c’est un vol caché, surtout si c’est le matin. Ils l’ont pris comme ça, et elle s’est retrouvée au Maroc. Elle a pratiquement jamais mis les pieds au Maroc depuis son arrivée en France. Et là on a des nouvelles, ça va elle essaye de se débrouiller, mais c’est choquant, et je ne comprends toujours pas pourquoi ils font ça. Au début, ils mettent un vol affiché, et parfois, avant de passer au tribunal administratif où il y a plus de chances d’être libérée, ils affichent un vol. Et après le deuxième vol, tu peux refuser mais c’est un vol caché. Et au troisième vol, ils te mettent un casque de boxe et ils te scotchent et te mettent dans l’avion.

On a prévu de faire une grève de la faim, car on est en contact avec le centre de Vincennes, et on a vu que leur grève de la faim a marché, donc on voudrait faire pareil. On essaye d’aller vers les gens, de leur dire voilà, il faut qu’on s’organise. On propose de faire une journée où on ne va pas manger. Moi je ne vais jamais au réfectoire, mais il y en a qui y vont et on est pas encore arrivé à convaincre tout le monde de ne pas y aller. Même par rapport à la Cimade, on a parlé de ne pas aller à l’infirmerie, à la Cimade, de ne pas parler à la police et de rester juste à l’intérieur du CRA ou dans la cour, pour pouvoir nous exprimer, et on est en train d’organiser ça, et j’espère pouvoir le faire avant de partir.

Depuis que je suis là, j’essaye d’aider tout le monde, quand un nouveau arrive, on lui donne des vêtements propres. J’ai eu au téléphone À-bas-les-CRA, ils sont venus, ils ont ramené des serviettes hygiéniques, ramené des vêtements propres, qu’on peut donner aux nouveaux. J’ai beaucoup appris, même si c’est une mauvaise expérience, ça nous apprend plein de choses, ça nous sensibilise, ça n’arrive pas qu’aux autres. Jamais je ne me serais imaginé être là, mais ça n’arrive pas qu’aux autres.

Y’a des personnes vraiment abandonnées, oubliées par l’État et par tout le monde. L’autre jour, je suis partie voir un chef gradé, et un policier m’a dit, « pourquoi tu sens bon tout le temps ? pourquoi tu t’habilles bien ? tu veux attirer qui ici ? il n’y a que des sans-papiers, ça va te servir à quoi ? » Il m’a démoralisé, je lui ai répondu « toi tu sais pas c’est qu’être une femme, si je fais ça, c’est pour moi, ça ne te regarde pas du tout ». Donc j’en ai parlé au chef gradé, il m’a dit « oui oui, c’est noté ». J’ai profité de l’occasion pour lui montrer qu’une dame n’avait pas de lumière dans sa chambre, car les ampoules ont cramé. C’était une dame qui a été libérée depuis, on était très très très contente pour elle. Il a fallu que je fasse une crise de panique et que je sois en larmes et dans tous mes états pour qu’ils viennent voir ce qui se passe ici, dans les chambres. Et si les policiers ramènent une personne à minuit, ils viennent, ils frappent pas aux portes, alors qu’on est des femmes. Aucun respect. Et il y a aussi les policiers qui viennent à 6h du matin prendre les gens pour le TGI et tout ça. Ils chantent dans les couloirs, ils crient, ils frappent aux portes. Ils menacent les gens. Une dame est venue, elle est restée 24h avant d’être déportée. Et une flic lui a dit, la personne la plus raciste que j’ai jamais vu je crois. Elle est venue et elle lui a dit « si tu refuses le vol, on va te mettre en prison, te scotcher » alors que c’était son premier vol, et qu’elle voulait repartir.

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Il y a tellement de choses, c’est sidérant, je suis dégoutée de la France, de tout ça. Il n’y a pas de droits de l’homme. Ils se battent pour que les chiens se fassent adopter, alors que les gens sont oubliés, expédiés.»

La police est raciste, la police est sexiste : témoignage d’une prisonnière dans le CRA de Mesnil Amelot

La police, dans les CRA comme partout, est raciste : les prisonniers et les prisonnières des centres de rétention le savent très bien, et le racontent tout le temps. Mais les meufs enfermées dans ces prisons pour étrangères, dont la parole sort beacoup moins, parlent aussi du sexisme quotidien des flics : les régards, les rémarques… le pouvoir des keufs dans les sections réservées aux femmes, comme à Mesnil Amelot par exemple, est encore plus oppressant, mais des solidarités se tissent pour résister à la police raciste et sexiste.

Dans ce témoignage, une copine prisonnière parle de tout ça, mais aussi de l’OFII, qui est présent dans les CRA. Dans sont site internet, on peut lire que “l’OFII exerce également une mission d’information, de soutien et d’écoute des étrangers dans les centres de rétention administrative (CRA). Dans ce cadre, des aides matérielles leur sont apportées afin d’assurer l’organisation de leur départ et faciliter leurs conditions de rétention.”  Une manière créative pour dire que l’OFII collabore avec la police…

Face à tout ça, face aux morts, aux violences policières et aux collabos dans ces prisons pour sans-papiers, quoi faire? Une assemblée publique aura lieu mardi 3 décembre, ouverte à toustes celleux qui veulent lutter pour la disparition des CRA. Organisons la riposte !

L’OFII

“La femme de l’OFII parfois pose des questions bizarres, comme si elle était une inquisitrice. Elle juge les gens trop vite tu vois ? Je pense qu’elle bosse avec les flics, elle essaie de retirer des infos de nous et tout ça.

Elle pose beaucoup de questions : “Pourquoi tu fais ci, pourquoi tu fais ça”… parfois ils [les salarié.e.s de l’OFII] prennent beaucoup de temps pour parler avec les gens de n’importe quoi, alors que les autres attendent à l’extérieur pour rien, et arrivent pas à acheter les cigarettes.

La police

Les flics ont beaucoup de mots mal placés : il y a des filles marocaines, ils disent “T’es sure que t’es roumaine ? T’es sure que t’es pas une voleuse?“.

Y a d’autres remarques aussi. Une albanaise est venue me dire : “Je suis mal à l’aise, y a un flic qui me dit des choses mal placées”. Du coup je suis allé le voir, et lui tu sais ce qu’il m’a dit? “C’est quoi, t’es jalouse parce que toi aussi t’en veux de moi?”.

Beaucoup de policiers font beaucoup de remarques sexuelles perverses, surtout à moi parfois.

Les conditions de rétention

Hier il y avait un jeune de 16 ans avec la mère, après il a été libéré. Mais parfois y a des gamins de 6 mois, de 8 mois, comme ça.

Par rapport au médecin, je ne suis pas d’accord par rapport à certaines choses. Et la nourriture, il y a des gens qui ne peuvent pas manger certaines choses mais sont obligés de le faire.

Mais l’Etat il prend de l’argent pour nous non? Avec cet argent, il faudrait au moins améliorer les conditions des gens ici.”

“Ici c’est le terminus, si tu arrives à t’en sortir c’est que t’as vraiment un mental d’acier”. Témoignage d’une prisonnière du Mesnil-Amelot

Pas beaucoup de monde semble être au courant : dans le CRA de Mesnil-Amelot une section est réservée aux prisonnières. En plus du racisme et de la guerre contre les pauvres, le CRA est aussi un lieu de violences sexistes contre les meufs qui n’ont pas les bons papiers. On relaye ici le témoignage d’une prisonnière du CRA de Mesnil-Amelot :

« Je suis ici depuis début septembre, j’étais d’abord au centre de Metz. Après un mois, il m’ont ramené à Charles de Gaulle pour un vol, j’ai refusé, ils m’ont mis en garde à vue et après ils m’ont mis ici à Mesnil Amelot. Quand je suis arrivé, j’avais des médicaments que je prenais à Metz mais ils m’ont tout pris. J’ai pleuré, j’ai tout fait mais rien. C’était limite comme si je parlais avec personne, ils s’en foutaient.

Du coup ils m’ont pris de force et ils m’ont mis dans la cellule. Là j’ai compris que c’est comme une prison, c’est encore pire qu’à Metz. Ça ressemble beaucoup à une prison, la zone est insalubre, c’est dégradé et pas entretenu, les toilettes sont sales et bouchées.

La laverie c’est pas bien, les vêtements ils sentent, on est obligé de les laver après, mais nous non plus on a pas vraiment de savon, on a un petit savon, qui ne te permet même pas de te laver.

J’ai compris que c’est à toi d’aller voir auprès de l’administration, quand tu pars si t’as la chance tu rentres voir l’administration, si t’as pas de chance tu peux rester pendant 3 – 4 heures début. Tu dois passer par une porte avec les policiers, s’ils te laissent pas rentrer tu peux pas voir l’administration, pareil pour infirmerie.

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Par exemple, j’ai mal aux dents et j’ai essayé d’aller à infirmerie et ils me laissent pas rentrer car ils disent que c’est trop tard pour aujourd’hui, ce sera demain 14h. c’est pour dire qu’ils s’en foutent, si t’as mal ou pas, ils s’en foutent.

Ça se passe comment avec la police ?

Les policiers sont là quand on mange, ils nous surveillent pendant qu’on mange, après ils ferment et ils nous ramènent dans la cellule. Pour l’embarquement c’est eux qui arrivent pour te porter même de force. Souvent le dimanche ils font la fouille, ils viennent en masse, même si t’es en train de te laver et tout tu dois sortir. Tout le monde dans la cour, et ils peuvent tout jeter de tes affaires pendant la fouille. Finie la fouille, tu peux rentrer.

Tu disais que t’as eu beaucoup de tentative d’embarquements ?

Oui moi c’est déjà la cinquième fois qu’ils me ramènent pour un vol, c’est pas normal. Surtout parce que j’ai juste un problème de papiers, je n’ai plus de visa, c’est tout.

Vous êtes combien dans la section ?

C’est organisé que les hommes sont d’un côté et les femmes de l’autre, on est séparées par un grillage. De femmes ici on est une vingtaine, voire plus, une trentaine. Avec différents cas, certaines sont ici pour les papiers seulement, d’autres sortent de prison, d’autres doivent être rapatriées en Italie ou en Espagne car elles sont dublinées. Il y a de femmes enceintes actuellement, un couple dont la femme est enceinte, et une autre toute seule, elle est enceinte de deux jumeaux en plus.

Cela pour te dire qu’ici c’est le terminus, si tu arrives à t’en sortir c’est que t’as vraiment un mental d’acier. Beaucoup ne résistent pas et ont des troubles à la tête. Tous les jours tu dors, tu manges et t’attends d’être libérée, au tribunal s’ils te libèrent pas ils te ramènent ici, toujours la même chose. »

* * *

« Je suis mère de deux enfants, j’ai été condamnée à 4 ans de prison depuis 2014. J’ai été condamné à 6 ans de prison, mais j’ai fait 4 ans, avec la réduction de peine moi j’ai fait 4 ans et 2 mois. Et j’ai accouché ma fille en prison. Maintenant mon fils est resté en Allemagne. […]

Et quand j’ai accouché ma fille, à 18 mois ils l’ont fait sortir de la prison. Et j’ai pas vu mon fils jusqu’à maintenant, et ma fille, quand ils l’ont fait sortir, on a signé un contrat avec une assistante sociale, quand j’allais finir mes peines, à la sortie de la prison, ils allaient me remettre mon enfant. Et à la sortie de la prison, quand j’ai fini ma peine, à la sortie de la prison, à ma grande surprise, je vois la police qui me prend et qui m’envoie dans un centre de rétention administrative, sans mon fils, et sans ma fille ! Et je suis arrivée, tout de suite j’ai demandé : ‘Mais pourquoi on m’amène ici, j’ai déjà fini mes peines, et on m’amène encore dans un centre de rétention !’. Et on me fait savoir qu’on va me renvoyer dans mon pays d’origine, sans mes enfants…

Et la préfecture aussi, la préfecture a voulu m’éloigner de ma fille et de mon fils. Mais pourtant, quand j’ai accouché en prison j’ai fait trois jours de coma, et je me sentais pas bien, je suivais des soins là-bas. Encore au centre de rétention, je me sens pas bien. Parce que… avec la nourriture, la manière qu’on nous traite… […] Quand le juge m’a libérée, j’ai décidé d’acheter les cadeaux pour mon enfant j’étais tellement contente. Parce que le 13 ma fille va faire 4 ans, moi j’étais contente, j’ai dit ‘ma fille, t’inquiète pas, maman va sortir demain’. Quand je sors, j’ai vu les policiers, ils ont décidé d’appeler les policiers pour moi. […]  J’ai souffert, j’ai fait tous les quatre ans pour mon enfant, j’ai pas »fait ça pour rien, j’ai décidé que dès que ça s’est fini je vais passer ma vie avec mes enfants. […] Mais ils ont décidé de tout faire pour m’envoyer moi dans mon pays sans mon fils et sans ma fille.

Mesnil-Amelot, bloc des femmes, 06/02/19

* *  *

“Y a une des nôtres là. Elle a fait 45 jours. On s’attendait à sa libération. Vu qu’ils ont pas affiché son vol. On a pensé qu’elle allait être libérée.

Sauf que ce matin tôt les policiers sont venus dans les chambres. Ils criaient: ‘C’est elle ? C’est elle ?’ Ils ont commencé à regarder les cartes. ‘C’est elle ? C’est elle ?’

Quand ils l’ont trouvée, ils l’ont prise : ‘Prépare tes affaires !’ Elle a demandé à aller aux toilettes. On lui a dit non. Elle a demandé à aller se brosser les dents, on lui a dit non.

On lui a dit ‘Non, tu pars maintenant !’ Elle a pleuré. Ils l’ont attrapée. ” Ça nous a fait mal.

Mesnil-Amelot, bloc des femmes, 23/01/19

Illustration : Photo Jeff Pachoud. AFP.

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