Le syndrome de résignation, une pathologie qui interroge en Suède

Des enfants qui tombent dans le coma pendant des semaines, voire des mois. C’est le syndrome de résignation, une maladie psychique qui sévit en Suède. La réalisatrice Dea Gjinovci y a rencontré plusieurs familles victimes de cette pathologie. Elle raconte.

6/07/2020

Des enfants et adolescents dans le coma pendant des semaines, des mois voire des années. C’est le syndrome de résignation, une maladie psychique qui touche les enfants de réfugiés dont la demande d’asile n’est pas encore accordée ou sur le point d’être refusée. “Ce qui a été observé chez ces enfants, c’est l’immobilité, la stupeur, le corps mou, le corps ne réagit pas à la douleur, il ne réagit pas aux stimuli, beaucoup arrêtent de manger“, explique le psychiatre Arash Javanbakht. Aussi, selon lui, les enfants concernés ont souvent passé les années cruciales de leur développement à vivre des expériences traumatisantes.

Plusieurs hypothèses

Depuis le début des années 2000, plusieurs centaines de cas ont été signalés en Suède. Pour son documentaire “Réveil sur mars“, la réalisatrice Dea Gjinovci y a rencontré plusieurs familles dont certains enfants sont atteints du syndrome de résignation. Selon elle, plusieurs hypothèses peuvent expliquer le phénomène. Tout d’abord, le temps d’attente d’une réponse finale sur le droit d’asile peut aller jusqu’à cinq ans dans le pays, un temps suffisant pour que les enfants s’intègrent. “Donc, ils sont scolarisés, ils apprennent la langue et ils se sentent, finalement, Suédois très rapidement“, explique Dea Gjinovci. Ainsi, un potentiel refus d’une demande d’asile va être davantage difficile à accepter pour ces enfants.

Autre explication : les lettres administratives et les lettres d’expulsion sont écrites en suédois. “Le problème, c’est que les parents ne parlent pas suédois donc c’est souvent les enfants qui lisent les lettres et qui annoncent la mauvaise nouvelle à leurs parents“, précise la réalisatrice. Une telle responsabilité peut être insoutenable pour certains d’entre eux.

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Une maladie mal comprise

Longtemps perçue comme une “maladie imaginaire” pour faciliter l’obtention d’une résidence permanente en Suède, c’est désormais une pathologie reconnue. Les médecins ont prouvé, par exemple, que les enfants ne pouvaient pas simuler une non-réaction à la douleur. Mais le syndrome de résignation reste mal compris. Il fait également l’objet de polémiques en Suède notamment parce qu’il irait à l’encontre de l’image du pays considéré comme “humanitaire” et “ouvert sur les étrangers“.

Des enfants “enfermés dans leur corps”

Si certains enfants mettent du temps à reprendre une vie normale après leur réveil, d’autres, au contraire, se rétablissent vite. “Une des protagonistes de mon film, s’était réveillée. En lui parlant, elle pouvait m’écouter, elle pouvait m’entendre et répondre à quelques mots et elle a dit à son père qu’elle reconnaissait ma voix“, raconte Dea Gjinovci. Selon elle, un tel niveau de conscience chez ces enfants révèle une dimension troublante de ce syndrome : “Ils sont presque enfermés dans leur corps et leur cerveau continue de fonctionner, ils continuent de penser et de savoir qu’autour d’eux, il y a leur famille, il y a des amis, il y a des connaissances mais ils ne peuvent plus communiquer avec eux“, conclut la réalisatrice.

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