5.mai.2020
Un véritable scandale politique se déroule sous nos yeux : le Sénat vient de voter une amnistie partielle pour tous les élus (y compris ministres), les employeurs et des fonctionnaires quand ils auront pris certaines décisions ayant conduit à la contamination de personnes !
I. LREM propose une amnistie « pour les maires »…
Nous avons récemment alerté via l’article de Régis de Castelnau à propos d’un projet d’amnistie des maires, initié par La République En Marche et relayé par Aurore Bergé (source ; arch ; JDD) :
« Nous proposerons une adaptation de la législation pour effectivement protéger les maires pénalement, mais aussi toutes les personnes dépositaires d’une mission de service public dans le cadre des opérations de confinement. »
Il faut dire que les plaintes pénales dans le cadre des manquements face à l’épidémie effraient énormément en haut lieu…
LREM cherche donc à modifier les incriminations pénales.
II. … bien que les maires ne craignent rien
Or, comme le rappelle Régis de Castelnau, spécialiste du sujet :
« Dans les années 90, après la mise en œuvre des lois de décentralisation, et en raison de mises en cause massives des maires dans l’exercice de leurs fonctions, le législateur a précisé les contours de cette responsabilité qui sont aujourd’hui définis dans l’article 121-3 du Code pénal […]
[Dans] Ce texte, fruit d’une élaboration particulière dans les années 90 à laquelle l’auteur de ces lignes a participé, [… voici] les deux nouvelles conditions exigées pour que l’auteur indirect du dommage puisse être condamné : d’abord n’avoir pas accompli les diligences normales en fonction des moyens dont on disposait, et ensuite commis une faute caractérisée exposant autrui à un risque grave qu’on ne pouvait ignorer.
Alors, il faut insister sur ce point, les maires chargés de mettre en œuvre les décisions irresponsables du gouvernement avec le manque criant de moyens qui caractérise la gestion macronienne de la crise seront protégés des mises en cause pénales par la notion de « diligences normales […] en fonction du pouvoir et des moyens dont ils disposaient » contenue dans le Code pénal.
État d’urgence sanitaire ou pas, si l’État envoie les maires au casse-pipe sans leur donner les moyens d’appliquer la politique qu’il a décidée, ceux-ci ne pourront pas être poursuivis. Ils sont d’ores et déjà protégés. Et ce d’autant que le Conseil d’État vient de rappeler dans son ordonnance d’annulation de la décision du maire de Sceaux imposant le port obligatoire du masque sur le territoire de sa commune, que les pouvoirs des maires en état d’urgence sanitaire étaient strictement limités, sans pouvoir d’initiative, à la mise en œuvre des décisions de l’État. »
Alors pourquoi ces parlementaires proposent-ils une inutile amnistie des maires ?
La réponse est incroyable…
III. La Commission des lois du Sénat la vote…
Cette amnistie a été votée ce 4 mai, en Commission des lois du Sénat, dans le cadre du projet de loi sur l’état d’urgence sanitaire, dont l’article 1er-II est donc aujourd’hui rédigé ainsi (source pdf, dossier):
Nul ne peut voir sa responsabilité pénale engagée du fait d’avoir, pendant la durée de l’état d’urgence sanitaire déclaré à l’article 4 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19, soit exposé autrui à un risque de contamination par le coronavirus SARS-CoV-2, soit causé ou contribué à causer une telle contamination, à moins que les faits n’aient été commis :
- ° Intentionnellement ;
- ° Par imprudence ou négligence dans l’exercice des pouvoirs de police administrative prévus au chapitre Ier bis du titre III du livre Ier de la troisième partie du code de la santé publique ;
- ° Ou en violation manifestement délibérée d’une mesure de police administrative prise en application du même chapitre ou d’une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement.
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