Le retour de l’Extrême Droite

Sochi, Russie,

par Dimitris Konstantakopoulos 
Nov. 6, 2024

Après l’émergence des néo-nazis en Ukraine, la montée de l’extrême droite à travers l’Europe, l’élection d’un admiratrice de Mussolini comme Premier ministre de l’Italie, l’entrée de l’extrême droite israélienne au gouvernement, c’est désormais un homme politique de l’extrême droite dite « radicale » qui a été élu Président des États-Unis. 

La victoire de Donald Trump est, à bien des égards, une victoire pour Benjamin Netanyahu, dont Trump a été l’instrument durant son mandat et qui a joué un rôle essentiel dans son élection en 2016 https://www.defenddemocracy.press/trump-russia-and-israel-the-wolff-allegations/ . Netanyahu incarne le courant le plus radical, presque « néo-nazi », de l’ « Internationale de la Finance », véritable centre du pouvoir souvent au-dessus des États. L’élection de Trump reflète non seulement la montée d’un vote antisystémique, qui s’oriente vers la droite faute de gauche, mais aussi les déplacements au sein de l’oligarchie mondiale de l’argent et de l’information, qui semble se tourner massivement vers des solutions plus autoritaires et totalitaires face à la crise systémique et multi-niveaux du capitalisme occidental, crise qui ne cesse de s’aggraver.

La victoire de Trump facilitera encore les crimes israéliens contre l’humanité au Moyen-Orient et augmentera les chances d’une guerre régionale, potentiellement nucléaire, contre l’Iran.

L’administration Biden n’a rien fait de substantiel pour l’environnement. Une administration Trump mettrait probablement la planète sur la voie d’un changement climatique irréversible, menaçant la survie de l’humanité.

Quant à l’Ukraine, il est difficile de prévoir ce qui va se passer. Trump a indiqué qu’il chercherait probablement à mettre fin à la guerre et a même promis d’y mettre un terme en 24 heures s’il est élu président, et même avant d’avoir prêté serment. « Je n’attends rien de Trump », nous déclare le professeur Karaganov, président honoraire du Conseil russe sur la politique étrangère et de défense, ici à Sochi, où nous assistons à la conférence annuelle du Valdai Forum. Selon des responsables russes de haut niveau, des émissaires de Trump se sont déjà rendus à Moscou, promettant de lever les sanctions et demandant, en échange d’un règlement de la question ukrainienne, que la Russie abandonne ses alliés, la Chine et l’Iran. « Nous ne le ferons jamais », nous répond un responsable russe à Sochi, « mieux vaut un allié fiable qu’un ennemi peu fiable ». D’ailleurs, c’est sous la présidence de Trump, et alors que ce dernier était cru ou accusé d’être pro-russe, que les États-Unis ont massivement armé l’Ukraine, la préparant au conflit qui a suivi, et qu’ils n’ont rien fait pour promouvoir une solution pacifique, comme la mise en œuvre des accords de Minsk. Ils n’ont pas non plus renié l’orientation vers l’adhésion à l’OTAN. C’est sous Trump que les bases de la guerre qui a éclaté plus tard ont été posées. 

En ce qui concerne la Chine, nous pouvons nous attendre à une intensification de la concurrence, et Trump imposera probablement des tarifs sur les produits européens également. 

À l’intérieur des États-Unis, la promesse de Trump de réduire les impôts des entreprises se traduira par une destruction encore plus grande de l’État-providence et un appauvrissement des couches populaires américaines, ce qui pourrait entraîner des conflits sociaux et politiques violents. 

La montée de l’extrême droite en Amérique facilitera inévitablement l’ascension de l’autoritarisme et des forces néo-fascistes à travers le monde, avec des dangers évidents pour la civilisation et la survie même de l’humanité. 

Une leçon de ces élections est qu’il est impossible pour le « centre extrême » et les « néo-libéraux globalistes » d’arrêter la montée du fascisme, qui reflète l’ impasse profonde du système capitaliste dominant, en train de se transformer en « capitalisme de destruction ». Les solutions autoritaires, d’extrême droite et ouvertement fascistes sont adaptées aux besoins politiques du capitalisme actuel. 

Pour stopper cette trajectoire, il faudrait une gauche radicale, sérieuse et programmatiquement solide, ayant des liens profonds avec les masses populaires, un réseau international et une perspective déterminée à rompre avec le système. 

Le triomphe de Trump est aussi le fruit de l’échec, de l’incapacité à répondre à la crise, des défaites et des compromis humiliants de la « gauche radicale » supposee actuelle, notamment Syriza, Podemos, Sanders et Corbyn. 

En particulier, cela résulte aussi de la position pro-guerre, pro-impérialiste et pro-OTAN adoptée par la gauche du Parti démocrate (ainsi qu’en Europe, par las majorite de la gauche, avec quelques exceptions mineures), ce qui a poussé une partie des électeurs pacifistes à soutenir Trump (ainsi que des partis d’extrême droite en Europe), lui permettant de se présenter comme une sorte de pacifiste dans l’une des plus grandes tromperies politiques de l’histoire mondiale.

Si cette attitude ne change pas, de nouvelles catastrophes politiques attendent la gauche occidentale.

Cependant, un aspect positif de l’élection de Trump est qu’elle a montré l’opposition de la majorité du peuple américain à la guerre menée par l’Amérique et l’OTAN contre la Russie en Ukraine. Cette opposition compliquera les actions du nouveau président s’il souhaite poursuivre la politique de Biden. 

Seule la construction d’une gauche totalement différente pourra arrêter cette marche occidentale et mondiale vers l’extrême droite. 

Il y a un siècle, la montée de l’extrême droite mettait en danger notre civilisation. Aujourd’hui, avec les forces productives et les technologies dont nous disposons, elle menace la survie même de l’humanité.