Il nous faudrait admettre – sans sourciller – que la Corée du Sud aurait été dans l’erreur dans son choix du masque pour tous, mais pas pour la surveillance de masse individualisée ?
Par Yannick Chatelain
28 mars 2020
Le temps viendra de faire le bilan et de recenser : les manquements, les discours contradictoires, etc. Pour l’instant nous y sommes : d’injonctions paradoxales en injonctions paradoxales la peur s’est emparée de la population française.
Actuellement chacun d’entre nous vit une situation inédite dans des configurations différentes, et plus ou moins difficiles. En état de sidération, l’esprit critique est certes mis a mal, mais il y a toutefois lieu de s’interroger sur la façon parcimonieuse dont le pouvoir exécutif s’inspire des best pratices du pays qui s’est révélé parmi les plus efficaces dans la gestion de cette crise sanitaire : la Corée du Sud.
Les masques : un peu, beaucoup, passionnément pas (plus) du tout
Autant la Corée du Sud a au plus tôt fourni des masques adaptés à l’ensemble de la population – s’appuyant certes sur une culture de port du masque – mais disposant du quantitatif nécessaire.
Autant le pouvoir français n’a cessé de tenir des propos contradictoires et laborieux, optant pour une nécessité de port du masque à géométrie très variable… parce que dans l’incapacité d’en fournir à tout le monde – dont les soignants et les personnes au contact de la population comme les forces de l’ordre.
Cet état de fait a conduit naturellement à des décisions drastiques de confinement, et à l’injonction de respecter les désormais fameux gestes barrières. Dans le même temps, le pouvoir a continué et continue de pondérer l’utilité du port d’un masque pour le citoyen lambda.
Le retour en grâce de la Corée pour… de la surveillance de masse
Ainsi dans un premier temps, il nous faudrait admettre sans sourciller que la Corée du Sud aurait été dans l’erreur dans son choix du port du masque pour tous, mais suivre ses méthodes et mettre en place une surveillance de masse individualisée ?
En effet, le gouvernement français à annoncé dès le mardi 24 mars inviter le nouveau comité de chercheurs et de médecins baptisé « Care » qu’il a créé afin de « réfléchir à une stratégie numérique d’identification des personnes ayant été au contact de personnes infectées », ce qui sous-entendrait un traçage GPS individualisé… ce n’est pas encore la puce, mais nous nous en rapprochons.
En aveugle, mais « tous » partants
Dès mercredi 25 mars, la GSM association annonçait qu’Orange, Vodafone, Deutsche Telekom et cinq autres opérateurs télécoms avaient accepté de partager avec la Commission européenne leurs données de géolocalisation recueillies grâce aux téléphones portables pour tenter d’enrayer la progression de l’épidémie de coronavirus et ce avant même que les uns comme les autres n’aient à ce stade vérifié l’intérêt sanitaire d’une telle décision.
Nonobstant la situation subie par une population qui n’est – qu’elle s’en rappelle – nullement responsable d’un confinement devenu impérieux, le discours récurrent culpabilisant les citoyens – qui majoritairement obtempèrent – s’apparente à mon sens à une bien vaine tentative de transfert de responsabilité.
Si la poursuite de la lutte contre la pandémie doit s’appuyer sur l’acceptation sociale d’un confinement à durée indéterminée – puisque régulièrement renouvelable – il est alarmant de voir, même temporairement, émerger l’idée d’une surenchère d’atteinte aux libertés publiques et individuelles ! Si cette dernière apparaît rationnelle, elle pourrait se révéler être un aller sans retour fatal pour nos démocraties.
Sauver ce qui peut être sauvé : vers une solution médiane ?
Dans cette approche erratique de la crise, tant qu’à utiliser la géolocalisation, il m’apparaîtrait salvateur, plutôt que de s’inspirer de la Corée du Sud redevenue source d’inspiration pour l’exécutif, de veiller à préserver l’anonymat des patients, de ne pas s’engager sur une voie glissante, qui ferait des malades des délinquants potentiels – en préjugeant de leur incivilité – : il serait raisonnable de privilégier la piste proposée par Le hub France IA, qui se propose de créer une application capable de prévenir les personnes qui se seraient rendues dans des zones à risque.
Ne pas céder à « l’esprit de panique », n’est pas le seul devoir des citoyens.