Italie, vers une «3ème République» sous tutelle de l’UE?

par Danielle Riva
Il Manifesto, 5 fevrier 2021

En Italie, la période baptisée « 1ère République » allait de la République votée en 1948, aux années 1994. Ces années furent marquées par une lutte bipartisane à mort entre le PCI (le plus grand parti communiste d’Europe) et la Démocratie chrétienne, sous le contrôle de forces occultes (services secrets divers et variés autour de la CIA qui ont même tenté la prise du pouvoir dans les années 1969/1970). L’Italie était le maillon faible de l’ « Alliance occidentale » et donc sous tutelle de l’Otan.

Cette « 1ère République » en 1993/94 a signé la fin du bipartisme, et elle s’est dissoute dans l’affairisme plus ou moins mafieux de « Forza Italia » sous la conduite du cavaliere di Arcore (Berlusconi), tout en étant remarquable par le dynamisme de son régime parlementaire à la proportionnelle intégrale qui obligeait à une recomposition permanente des forces de gouvernement, faisant de l’Italie la championne avec plus de 67 gouvernements en 70 ans !

La « deuxième République », qui a suivi, a dansé au rythme de la dérive des restes du Parti communiste et de la Démocratie italienne, du développement du « populisme » et du « séparatisme » de la Lega du Nord (Bossi). Elle s’épuisa en « combinazione » entre des forces de moins en moins importantes, de moins en moins représentatives, de plus en plus éclatées, qui obligeaient à des alliances de gouvernement (il y a eu près de 70 groupes politiques, si l’on y ajoute les particularismes régionaux, ex : Trentino et Alto-Adigio, se retrouvant dans différentes alliances lors des élections !).

Elle vit aussi disparaître la présence de l’extrême gauche dans les deux Assemblées (permise par la proportionnelle), victime des manipulations berlusconiennes sur les critères de représentativité minimale pour obtenir un siège, et du reflux des idéaux révolutionnaires du Mai rampant (1969) et de la transformation du PCI en force centriste. Mais ce fut aussi le renouveau des campagnes contre la Mafia, la corruption, « Mani pulite » (« mains propres ») et parfois contre le premier Ministre lui-même (Berlusconi) image de cette collusion entre la mafia et la politique, qui malgré plusieurs procès n’a jamais pu être établie.

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Une faiblesse institutionnelle native à la sortie du fascisme qui a déterminé l’Italie à arrimer, son vaisseau à l’UE pour faire partie des 3 pays fondateurs. Elle a d’ailleurs toujours un sentiment d’amertume au fait que le « couple « Franco-Allemand » oublie cela ; que les Allemands l’aient classée dans les PIGS (Portugal, Italie, Grèce, Espagne), même si aujourd’hui, les Allemands se sont rendus compte que l’effondrement de l’Italie allait avoir une incidence violente pour leur propre économie.

C’est Renzi avec sa minable opération, qui a ouvert une nouvelle phase rejetée jusque-là par les Italiens : celle de la mise en tutelle de l’Italie par la BCE, à la Grecque, mais en moins violent, car avec un « cadeau » de 200 milliards pour le « redressement » de la troisième économie de l’UE.

Toutes les forces politiques importantes, de l’extrême droite à la « gauche », en passant par Forza Italia, le M5S, et quelques nostalgiques du fascisme, confondues en une ultime coalition pour sauver le pays du marasme provoqué par la covid 19 et les crises parlementaires successives, et dont les appétits ont surtout été aiguisés par cette magnifique manne européenne, quelles qu’en soient les conditions, entre autres de casse sociale.

Une sorte de gouvernement de salut Public pour une République plus affaiblie que jamais, vouée à la seule distribution de cet argent sous l’égide de la BCE et de son ancien directeur, Draghi, aujourd’hui, nouveau premier ministre.

Les Temps sont rudes. Une « 3ème République » sous tutelle européen ? L’Italie pourra-t-elle surmonter cette épreuve comme elle l’a fait jusqu’à présent grâce à sa créativité politique ?

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