Le sociologue Fabien Jobard note que le bilan, en termes de blessés, de ce mouvement social est sans précédent depuis Mai 68
Fabien Jobard est directeur de recherches au CNRS, au sein du Centre de recherches sociologiques sur le droit et les institutions pénales (Cesdip). Il est également chercheur au Centre Marc-Bloch à Berlin. Il a coécrit, avec Jérémie Gauthier, Police : questions sensibles (PUF, 108 pages, 9,50 euros), et, avec Jacques de Maillard, Sociologie de la police. Politiques, organisations, réformes (Armand Colin, 2015).
Les forces de l’ordre ont réalisé un nombre record d’interpellations préventives le 8 décembre, en amont des mobilisations des « gilets jaunes ». Près de 1 500 personnes ont été arrêtées en France. Que vous inspire ce chiffre ?
A strictement parler, ces interpellations ne sont pas préventives : elles répriment une incrimination créée sous la présidence de Nicolas Sarkozy, qui consiste à se regrouper en vue de se préparer à commettre, par exemple, des dégradations. « En vue de la préparation » permet d’interpeller un très grand nombre de personnes dans un très large périmètre et, in fine, de les empêcher de manifester. Ce n’est pas la Préfecture de police, ce ne sont pas les policiers qui empêchent de manifester, mais bel et bien notre droit ordinaire, et c’est le signe d’une évolution marquante.