Acte XXIII des gilets jaunes: une journée de répression pour la presse

21 avril 2019

RSF, le SNJ et le barreau de Paris dénoncent les violences et les arrestations dont ont été victimes de nombreux journalistes lors de leur couverture de la journée de mobilisation des gilets jaunes samedi 20 avril. À Paris, deux journalistes indépendants ont été interpellés et placés en garde à vue.

« Il y a eu plusieurs interpellations de journalistes et d’autres incidents », a dénoncé le premier secrétaire national du Syndicat national des journalistes (SNJ), Vincent Lanier. Les arrestations à Paris des journalistes indépendants Gaspard Glanz et Alexis Kraland, notamment, ont suscité de vives réactions.

Gaspard Glanz, dont l’arrestation place de la République a été filmée, était toujours en garde à vue dimanche en milieu de journée. Selon la rubrique CheckNews de Libération, le parquet lui reproche des faits de « participation à un groupement en vue de commettre des violences ou des dégradations » ainsi qu’un « outrage sur personnes dépositaires de l’autorité publique ».

Gaspard Glanz, fondateur de l’agence Taranis News arrêté place de la République à Paris le samedi 20 avril 2019 :

Le journaliste vidéo Thibault Izoret a également filmé la scène. On y voit, en plus de l’interpellation de Gaspard Glanz, une charge des forces de l’ordre contre Sacha Benitah, qui couvrait la manifestation pour Le Figaro.

Alexis Kraland, qui a été libéré dimanche matin après huit heures de garde à vue, a expliqué sur Twitter avoir été arrêté gare du Nord après qu’un policier lui a demandé de lâcher sa caméra, considérée comme une « arme par destination ». Le journaliste a refusé et aurait ensuite été frappé. « Ils ont donc matraqué ma main qui la tenait avant de m’interpeller pour “rébellion de palpation”. »

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« On commence à se poser des questions : est-ce qu’il y a une volonté déterminée d’intimider notamment les photographes sur le terrain ?, interroge Vincent Lanier. On a l’impression que certains sont des cibles. Il y a des tensions, c’est vrai, sur le terrain entre des policiers et des photographes, mais de là à interpeller, il y a un gros problème. On est sur une pente très dangereuse par rapport à la liberté d’informer, c’est la liberté de la presse qui est menacée. »

De son côté, Reporters sans frontières a dénoncé « un sombre bilan » de la journée de samedi, marquée par « deux journalistes indépendants interpellés et plusieurs autres ciblés par des tirs de LBD alors qu’ils étaient clairement identifiés Presse. L’information est un droit ! », rappelle RSF.

À Toulouse, où des heurts ont éclaté en fin de manifestation, plusieurs journalistes ont aussi dénoncé des violences. « Touché par une grenade de désencerclement envoyée en cloche », a notamment tweeté Kevin Figuier, photographe et rédacteur indépendant. « J’ai vu la grenade dans les airs et heureusement je me suis tourné sinon je l’aurais reçu en pleine figure », a-t-il affirmé en indiquant qu’il allait saisir l’IGPN. Il dit avoir une plaie au mollet droit et un hématome au dos.

Frédéric Scheiber, journaliste pour Actu Toulouse, a également été touché. « Notre journaliste a été blessé au genou par une grenade de désencerclement puis délibérément visé par les gaz lacrymo des forces de l’ordre », a dénoncé le rédacteur en chef du journal, Pascal Pallas, photo à l’appui.

« Qu’est-ce qui justifie d’interpeller des reporters, si ce n’est pour les empêcher de travailler ? Ne bafouez pas l’état de droit Christophe Castaner ! Préfecture de police, respectez la liberté d’informer ! » a d’ores et déjà réagi sur Twitter le SNJ, premier syndicat des journalistes

Le journaliste freelance Clément Lanot a, de son côté, affirmé sur Twitter avoir été « visé par un LBD ».

Le barreau de Paris a également condamné, sur Twitter, « les arrestations et les agressions de journalistes lors des manifestations […]. La liberté de la presse, comme celle de manifester, sont fondamentales et doivent être respectées », rappellent les avocats.

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« Liberté de la presse menacée… on ne pensait pas avoir à défendre aujourd’hui en France une liberté aussi fondamentale… et pourtant ! », écrit pour sa part la secrétaire générale de la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH) Magali Lafourcade sur Twitter, en réaction aux événements de la journée de samedi.

Interrogé par l’AFP, le ministère de l’intérieur a répondu : « Les forces de l’ordre sont mobilisées chaque samedi pour empêcher les violences, assurer la sécurité des manifestants, mais aussi celle des journalistes, régulièrement – et samedi encore – pris à partie. Si des journalistes sont interpellés – ce qui peut arriver – ils ne le sont évidemment pas ès qualités mais en raison des infractions relevées. »

https://www.mediapart.fr/journal/france/210419/acte-xxiii-des-gilets-jaunes-une-journee-de-repression-pour-la-presse