Qui est Donald Trump?

Par Dimitris Konstantakopoulos
24 janvier 2025

Est-ce que Donald Trump est « anti-systémique », « pacifiste » et « ami de la Russie », comme certains le prétendent ? C’ est la vie qui va donner la réponse définitive à cette question. Mais si l’expérience historique prouve quelque chose est que, même quand les forces d’extrême droite apparaissent ici ou là comme « pacifiques », elles ne le font que pour gagner du temps en vue d’une contre-attaque. 

Dans deux articles précédents (https://www.konstantakopoulos.gr/31766/%ce%b7-%ce%ac%ce%bd%ce%bf%ce%b4%ce%bf%cf%82-%cf%84%ce%b7%cf%82-%ce%ac%ce%ba%cf%81%ce%b1%cf%82-%ce%b4%ce%b5%ce%be%ce%b9%ce%ac%cf%82-%ce%ba%ce%b1%ce%b9-%ce%b7-%ce%b5%cf%80%ce%bf%cf%87%ce%ae-%cf%84%ce%b7 et https://www.defenddemocracy.press/the-rise-of-the-far-right-and-the-age-of-great-confusion-and-deception/ , nous expliquions pourquoi la fraude devient de plus en plus l’arme obligatoire d’un « capitalisme du désastre » (« disaster capitalism ») et d’un empire occidental en déclin et en crise. 

Il est évident que, si le système dominant doit passer à un stade de totalitarisme beaucoup plus violent, comme le furent le fascisme et le nazisme dans l’entre-deux-guerres, alors il a besoin d’une très grande dose de fraude, de confusion et d’irrationalité, afin que de larges masses et des pays entiers puissent être trompés et emprunter la voie du totalitarisme, «pacifique » ou « violent », du fascisme, de la guerre et de l’irrationalisme. Il lui faut, avant tout, que les forces de contestation du système que la crise elle-même génère inévitablement, puissent être utilisées comme « carburant » de cette transition. 

Cela s’est passé il y a cent ans dans l’Italie de Mussolini et dans l’Allemagne d’Hitler. Comme nous l’avons soutenu dans notre article précédent, il y a eu un besoin croissant de recourir à l’absurdité ouverte, sous un manteau soi-disant « anti-systémique », surtout depuis 2000 et l’arrivée au pouvoir des néoconservateurs aux États-Unis (Bush et Cheney avec le soutien et selon la planification de Netanyahou), afin de soutenir une politique « radicale » (geurres permanentes au Moyen Orient) qu’aucun citoyen occidental raisonnable ne pourrait normalement soutenir. Un « complot des complots » se développe même, qui tente, par la diffusion de bêtises, d’absurdités et de théories de complots inexistants, de dissimuler les véritables complots, et surtout le plus important d’entre eux, qui n’est rien d’autre que l’effort d’une infime minorité d’ “oligarques” internationaux très riches, provenant principalement de deux ou trois nations, dans leur grande majorité à la personnalité inévitablement psychiquement et spirituellement perturbée, pour contrôler et dominer toute l’humanité, devenant un véritable cancer dans son corps. 

Lorsque le 11 septembre s’est produit, nous avons assisté à une prolifération de dizaines de théories, certaines totalement infondées, sur ce qui était arrivé aux Twin Towers. Le principal résultat de leur diffusion a été d’éviter de poser la question fondamentale : « Pourquoi l’État américain, malgré une multitude d’avertissements, n’a-t-il pas agi pour empêcher les attaques ? » Ainsi que la deuxième question, tout aussi fondamentale, « A qui ont bénéficié les attentats ? » Au lieu de cela, nous discutions de la question de savoir si des avions s’écrasaient réellement sur le Pentagone ou de la durabilité du béton des tours. 

Un autre exemple très important est la négation du changement climatique en tant que résultat de l’activité humaine, négation financée chaque année par les multinationales des combustibles fossiles à hauteur de centaines de millions de dollars, qui a également induit en erreur de nombreuses personnes bien intentionnées, mais dépourvues d’éducation et de culture scientifiques solides. Mais il existe des centaines d’autres exemples. 

De cette façon, et parce que la gauche est dans l’état « ruineux » que nous connaissons, la remise en question que produit inévitablement le système lui-même n’est très souvent pas dirigée et ne renforce pas un effort concerté vers le changement social nécessaire, mais se diffuse sans effet ou renforce les mouvements prétendument « anti-systémiques » d’extrême droite, qui visent à changer le système répugnant existant par un système encore pire ! 

Le résultat, combiné à l’absence d’une force de gauche cohérente et sérieuse au niveau international, capable de défier de manière crédible le système actuellement dominant du «capitalisme du désastre », de proposer une alternative socialiste et d’organiser les luttes des peuples, est la passivisation des gens, ceux en particulier qui manquent d’une éducation politique sérieuse et d’une expérience de participation à des mouvements sociaux, et leur incapacité à résister à des forces qui semblent presque omnipotentes et capables d’agir de manière incompréhensible pour le commun des mortels et, en fin de compte, l’«affectation» à des mouvements d’extrême droite de la tâche de résoudre les problèmes sociaux. Les Allemands voulaient faire une révolution, mais ils n’ont pas osé et l’ont confiée à Hitler, écrit Wilhelm Reich, l’un des plus profonds penseurs du phénomène national-socialiste. D’autres se tournent vers la métaphysique, vers la recherche d’une solution individuelle et personnelle, ou vers des mouvements parareligieux comme l’Internationale évangélique – qui est en réalité une Internationale guidée par et au service du Sionisme. 

Un chaos spirituel prépare le terrain pour l’avènement d’un dictateur mondial 

Il est bon de rappeler que les Allemands ont voté en masse pour Hitler. Et ils n’ont pas voté pour lui pour ce qu’il était ou ce qu’il avait l’intention de faire, ils ont voté pour lui parce qu’ils ne pouvaient pas imaginer ce qu’il ferait, parce qu’il apparaissait comme un patriote et un socialiste (national-socialiste). Ils ont également voté pour lui parce que, face à une crise très profonde, aucune autre alternative crédible ne leur a été proposée, ni par l’establishment bourgeois et capitaliste allemand, ni par le vaste mouvement socialiste et communiste, qui a essentiellement évité de se battre pour empêcher l’ascension d’Hitler. 

Par analogie, pour les mêmes raisons profondes et de manière similaire, l’extrême droite se développe aujourd’hui en Occident, représentée par des courants comme celui de Benjamin Netanyahu, maître de la tromperie, l’un des hommes politiques les plus puissants aujourd’hui et ayant la plus grande influence dans l’ensemble de l’ «Occident collectif», avec d’excellentes relations avec tout le spectre de l’extrême droite mondiale.  

Les « mondialistes » (« globalistes ») ne sont pas les seuls impérialistes 

La raison pour laquelle le système mondial dominant a besoin de l’extrême droite aujourd’hui est la crise du système précédent de domination impérialiste (celui de la «mondialisation libéral »), son incapacité à assurer la domination mondiale de l’Occident, mais aussi le consensus social en son sein, comme le démontre aujourd’hui la grande crise qui frappe PAR EXEMPLE le pouvoir en Allemagne et en France. 

L’extrême droite est donc nécessaire pour faire la transition du système précédent de domination impérialiste (« mondialisation ») vers un nouveau système basé sur le nationalisme (réactionnaire – car il y a aussi un nationalisme progressiste des nations qui se défendent), s’il ne conduit pas au fascisme pur. 

Ce qui déroute beaucoup de gens, c’est que ces courants ont parfois l’apparence d’être  « pro-russes » et « anti-guerre ». Ils en ont l’apparence, mais ils nele  sont pas et ne peuvent pas l’être. Par exemple, nous savons aujourd’hui que Trump a été élu la première fois avec l’aide massive des services de renseignement israéliens . Dans le même temps, des accusations ont été portées contre lui (le renforçant politiquement plutôt que de lui nuire, car elles le faisaient apparaître par contraste comme un homme pacifique) selon lesquelles il était «l’homme de Poutine ». 

C’est étrange de voir comment, pour un “homme de Poutine”, Trump a bombardé la Syrie à deux reprises malgré le déploiement de forces russes là-bas (quelque chose qu’Obama avait refusé de faire pour cette raison même), armé l’Ukraine au maximum, comment il n’a rien fait pour que les accords de Minsk soient mis en œuvre, a lancé un vaste programme de modernisation des forces nucléaires américaines, aboli le traité INF sur les missiles européens, ce que Moscou considère à juste titre comme totalement déstabilisateur, et entrepris une série d’autres actions qui ne correspondent pas à son profil prétendument «pacifiste ». 

Le fait que l’argument selon lequel Trump n’a pas mené de guerres, contrairement à Obama, ait pris de l’ampleur, est révélateur de la pensée superficielle qui domine notre époque. Les guerres ne se produisent pas du jour au lendemain. Ils se préparent avec des politiques pratiquées depuis des décennies. En lisant les analyses de Yinon, par exemple, on voit comment Israël prépare, depuis les années 1980, la désintégration actuelle de la Syrie. Comme l’a écrit à juste titre Michael Klare, l’un des analystes géopolitiques les plus avisés, Trump (au cours de son premier mandat) nous a fait passer « des guerres sans fin d’Obama à la préparation de guerres apocalyptiques ». C’est d’ailleurs au cours du premier mandat de Trump que la « doctrine » stratégique américaine a changé, proclamant la Russie et la Chine comme les principales « menaces » et « adversaires » des États-Unis, en lieu et place du « terrorisme » (le « nom de code » de l’islam radical). (pour tout cela vous pouvez également consulter notre précédent article https://www.defenddemocracy.press/can-trump-be-a-solution/).  

Read also:
Thousands protest in Tehran over Suleimani killing

Ce ne sont pas les opinions personnelles de tel ou tel homme politique, ni la démagogie affichée qui peuvent nous permettre de comprendre l’essence de sa politique. La principale caractéristique de l’extrême droite est la fraude. Elle apparaît comme prétendument antisystémique, mais elle ne remet en aucune façon en cause les fondements économiques et sociaux du système dominant : le grand capital financier international et les politiques économiques et internationales dont il a besoin et qu’il veut imposer. 

Précisément parce que la politique de l’extrême droite occidentale est déterminée par les besoins des forces oligarchiques qu’elle exprime aux États-Unis, en Europe et ailleurs, et précisément parce que ces forces ont des raisons organiques et sérieuses de vouloir la dissolution, l’écrasement de puissantes entités étatiques autonomes , comme la Russie, la Chine, l’Iran et certainement des groupes comme les BRICS dans la mesure où ils tentent de devenir un pôle de pouvoir alternatif, l’extrême droite est stratégiquement, mais pas nécessairement tactiquement, orientée vers la préparation d’une guerre contre eux, même si elle peut, pour des raisons tactiques, parler de paix. 

Alors, même si les forces d’extrême droite apparaissent ici ou là comme « pacifiques » ou «pro-russes », même si elles apparaissent amicales envers Moscou sur certains sujets, elles ne le font que pour manœuvrer, pour gagner du temps, pour préparer une contre-attaque depuis de meilleures positions. Hitler, pour reprendre un exemple classique, est non seulement apparu comme une force pro-russe (alors que dès le début son objectif principal était d’attaquer la Russie soviétique, le fameux Drang nach Osten de l’impérialisme allemand), mais est également allé jusqu’à conclure une alliance avec l’URSS deux ans avant qu’elle ne soit attaquée !!! C’est un fait que les événements ne se répètent jamais exactement sous la même forme, mais la connaissance de l’Histoire et l’utilisation de la méthode des analogies historiques sont essentielles pour que la politique ne soit pas aveugle. 

Le rôle stratégique de l’extrême droite occidentale était dans le passé, est aujourd’hui et ne peut être dans le futur autre que la préparation des conditions idéologiques, matérielles et politiques de la Grande Guerre à venir si nous ne l’arrêtons pas par une forte action de masse au niveau mondial ; d’une Grande Guerre dont le conflit en Ukraine et le massacre en Palestine ne sont que comme la répétition générale et la préfiguration. 

Comme les Première et Seconde Guerres mondiales, comme la Guerre froide, les guerres ne naissent pas de telle ou telle idéologie « libérale », « nationaliste » ou autre. Les idéologies sont mobilisées et utilisées pour justifier des politiques qui découlent du besoin organique du capitalisme et de l’impérialisme de lutter aujourd’hui pour la domination mondiale et de ne pas laisser émerger des pôles de pouvoir alternatifs. 

Ceux qui veulent lutter contre le totalitarisme et l’impérialisme et la menace de la grande guerre qu’ils préparent doivent être très prudents avec les concepts qu’ils utilisent et les définitions qu’ils donnent afin de ne pas renforcer involontairement les phénomènes qu’ils veulent combattre. Le sérieux, la rationalité, la pensée critique, la science, ainsi que l’amour et l’humanisme, sont les armes les plus puissantes dont dispose l’homme s’il veut lutter pour sa Liberté. Ce qui signifie, à notre époque, avec les forces productives et les technologies dont nous disposons : pour sa survie même. 

Cet article a été publie en grec https://www.konstantakopoulos.gr/31815/o-%ce%b1%ce%bd%cf%84%ce%b9%cf%83%cf%85%cf%83%cf%84%ce%b7%ce%bc%ce%b9%ce%ba%cf%8c%cf%82-%cf%86%ce%b9%ce%bb%ce%b5%ce%b9%cf%81%ce%b7%ce%bd%ce%b9%cf%83%cf%84%ce%ae%cf%82-%ce%ba. Il est traduit pour Defend Democracy Press par Christos Marsellos

Read also:
Mais que se passe-t-il entre le Crif et Jean-Luc Mélenchon ?

We remind our readers that publication of articles on our site does not mean that we agree with what is written. Our policy is to publish anything which we consider of interest, so as to assist our readers  in forming their opinions. Sometimes we even publish articles with which we totally disagree, since we believe it is important for our readers to be informed on as wide a spectrum of views as possible.