Alors que l’Asemblée Nationale étudiait, en première lecture, la très controversée loi sécurité globale, des milliers de personnes se sont mobilisées, partout dans l’hexagone, malgré le confinement et la répression policière.
Par Julian Vadis
18 novembre 2020
Crédits photo : Alyson Bercuingt / Hans Lucas
Un bol d’air frais dans un climat marqué par le tournant autoritaire du gouvernement. Ce 17 novembre, l’Assemblée Nationale étudiait, en première lecture, la très liberticide loi Sécurité globale, mise en porte-à-faux pour son contenu portant « atteinte aux droits de l’Homme et aux libertés fondamentales » par une institution aussi réactionnaire que l’ONU. Ce 17 novembre aussi, de nombreux rassemblements étaient appelés partout dans l’hexagone contre cette loi liberticide, et en premier lieu à Paris devant l’Assemblée Nationale elle-même.
Le moins que l’on puisse dire, c’est que ces rassemblements ont surpris par le nombre important de manifestants qui ont répondu à l’appel. À Paris, ce sont plusieurs milliers de personnes qui se sont mobilisées, malgré une situation politique marquée par la peur légitime du Covid19 et les risques de violences policières évidents au vu du caractère même de la manifestation. Parmi les manifestants, de nombreux jeunes, lycéens ou étudiants, sont venus crier leur colère et leur refus, au delà de la loi Sécurité globale, de l’ensemble du tournant autoritaire, islamophobe et sécuritaire du gouvernement. Des Gilets jaunes qui, hasard du calendrier, « fêtaient » ce 17 novembre les deux ans de leur mouvement qui hante toujours les classes dominantes, étaient également de la partie, tout comme de nombreux militants associatifs, syndicaux et politiques. Par ailleurs, la manifestation parisienne a été le théâtre de nouvelles violences policières, à grands coups de gaz lacrymogène et de canon à eau, qui se sont abattus sur les manifestants. Des images de violences policières que le gouvernement, par le biais de sa loi, voudrait voir bannies des réseaux sociaux.
« On est là parce que les droits de nos concitoyens, des justiciables, de la presse, la démocratie est en danger par la loi qui est en train d’être votée en plein confinement comme si de rien n’était » explique ainsi Louise, de la BlackRock Brigade. Un sentiment partagé par Camille et Annabelle, deux étudiantes pour qui « on veut pas généraliser l’état d’exception dans lequel on se trouve ».
Camille Et Annabelle étudiantes « on veut pas généraliser l’état d’exception dans lequel on se trouve » pic.twitter.com/NCPKZ4COJX
— Révolution Permanente (@RevPermanente) November 17, 2020
Ailleurs dans l’hexagone, la mobilisation a également été forte. C’est le cas à Marseille, où là aussi plusieurs milliers de manifestants ont répondu
l’appel.
À Toulouse aussi, la mobilisation a été importante, avec plus de 2500 manifestants. Comme l’explique Alberta, étudiante et militante au NPA-Révolution Permanente, « il y a deux ans, on faisait trembler le gouvernement avec le mouvement des Gilets jaunes. En mai dernier, le monde entier se révoltait contre les violences policières. Pas un centime de plus pour la police ! » Un constat partagé par Jean-Louis, soignant au CHU de Toulouse et pour qui il est « plus facile d’investir dans la répression que dans l’hôpital ou dans l’éducation. Ce gouvernement et les précédents, ce sont eux les casseurs, qui cassent tous les mouvements et tout le système de solidarité ». Très rapidement, la manifestation toulousaine a également été fortement réprimée, se voyant gazée puis dispersée.
Jean-Louis, soignant au #CHU #Toulouse : "C'est plus facile d'investir dans la répression que dans l'hopital ou dans l'éducation. Ce #gouvernement et les précédents, ce sont eux les casseurs, qui cassent tous les mouvements et tout le système de #solidarité. #LoiSecuriteGlobale pic.twitter.com/mAGPPtJAlC
— Révolution Permanente (@RevPermanente) November 17, 2020
Des images de mobilisation importante qui se sont également vues dans de nombreuses villes, de Bordeaux à Nantes en passant par Grenoble, Lille et Le Mans, entre autres.
Contre l’offensive islamophobe, autoritaire et sécuritaire du gouvernement
Si cette mobilisation du 17 novembre est un bol d’air frais, c’est aussi car elle témoigne d’une colère sociale latente qui s’est exprimée sporadiquement ces dernières semaines, de la mobilisation dans les lycées et chez les enseignants à la marche massive des sans papiers. Si la conjoncture actuelle porte à droite, avec une forte offensive des franges réactionnaires, la loi sécurité globale indigne au plus haut point. Et au delà, c’est bien la colère contre l’islamophobie d’Etat, les violences policières et la gestion répressive de la crise sanitaire qui s’est exprimée dans la rue, dans la continuité des dernières séquences de mouvement social qui avaient secoué l’hexagone, comme l’énorme mobilisation de la jeunesse contre le racisme d’Etat et les violences policières, ou encore les hospitaliers, dont la colère a été canalisée dans le Ségur.
Dans une situation explosive, avec en lame de fond une crise économique qui ne nous promet que chômage et précarité, la mobilisation de ce 17 novembre démontre d’une part que diverses franges de notre camp social se sont spontanément mobilisées et ont convergé dans la rue, et d’autre part que, malgré la conjoncture actuelle, il y a fort à parier que cette colère exprimée n’est pas un épiphénomène, et que nous allons vers de grands affrontements sociaux dans les semaines et mois à venir.
Il est donc indispensable, face à un gouvernement déterminé et de plus en plus autoritaire, de préparer la contre-offensive. Cela passe par une rupture de tout cadre de dialogue social et par l’élaboration d’un réel plan de bataille, s’adressant à l’ensemble des secteurs populaires, contre les licenciements et la répression, contre l’islamophobie et les dérives autoritaires du gouvernement. C’est à ce prix qu’il sera possible de briser la conjoncture actuelle, et d’ouvrir la voie à une alternative progressiste issue de la base, par la grève et par l’action.