Par Gustavo Buster
22 juin 2018
Un peu plus de deux semaines se sont écoulées depuis la formation du nouveau gouvernement Sánchez. Ce n’est probablement que le lundi 18 – moment où est prévue une intervention télévisée du président – que nous connaîtrons son programme politique. Le climat politique a toutefois amorcé un virage à 180 degrés, entraîné par une vague d’optimisme, l’impuissance de l’opposition du Parti populaire [traversé par la recherche d’un leader de rechange à Mariano Rajoy] et de Ciudadanos ainsi que les retrouvailles d’un «buenismo» [terme qui désigne une approche caritative/d’aide envers les défavorisés, fondée sur un certain «sentimentalisme» autosatisfait] nostalgique, autour de l’accueil des réfugiés de l’Aquarius. La démission du tout nouveau ministre de la culture et des sports [pour des faits de corruption de cet écrivain et ex-présentateur de télévision], Maxím Huerta, et son remplacement par José Guirao [ex-directeur du Musée Reina Sofia] confirme les augures favorables. La faim et la soif d’espérance, suite à la longue sécheresse de la gestion de la crise économique et du régime de 1978 par Mariano Rajoy, sont presque bibliques. [Rajoy s’est recyclé comme fonctionnaire au bureau N° 1 des hypothèques de la station balnéaire d’Alicante; un poste occupé il y a 28 ans, avant sa carrière politique!]
Le cabinet des ministres
La constitution du nouveau cabinet, composé en majorité de femmes – un clin d’œil au mouvement du 8 mars qui reflète également l’électorat du PSOE – a été saluée pour «sa capacité technique et sa préparation». Il correspond toutefois en grande partie au secteur du PSOE qui a accompagné Pedro Sánchez au cours de sa traversée du désert, du coup interne d’octobre 2016 jusqu’à la récente motion de défiance. A cela s’ajoute la présence de représentants issus de négociations avec les fédérations du parti, comme celle d’Andalousie, où le secteur Sánchez reste minoritaire [la «baronne» d’Andalousie, à la tête de l’exécutif de la communauté autonome, est la principale adversaire de Pedro Sánchez, Susana Díaz]. Il comporte de même des «personnalités» en provenance de secteurs sociaux mobilisés contre la politique du gouvernement Rajoy – tels ceux de la science et de la culture – qui ne sont toutefois pas représentatifs de ces derniers.
Signe des temps, aucun travailleur ne figure dans ce cabinet. Les espoirs que Toni Ferrer – coordinateur du groupe de syndicalistes qui a soutenu Sánchez lors des élections primaires au sein du PSOE [en juin 2017] – devienne ministre du Travail ont été déçus. La «valeur professionnelle» des nouveaux ministres ne correspond pas, dans une large mesure (il suffit d’observer leurs CV), avec les ministères qui leur ont été assignés. Le message est le suivant: il s’agit d’exercer un arbitrage «technique» entre les intérêts sociaux qui s’affrontent. L’aspiration à constituer un «centre-gauche» débute par une consolidation du «centre» et une dispute de cet espace politique à Ciudadanos, formation qui incline toujours plus vers un «régénérationisme» espagnoliste, néolibéral et centraliste. Seul l’ancien président José Maria Aznar [du PP, qui a exercé deux mandats entre 1996 et 2004], autoproclamé héros du trio des Açores [référence de la rencontre sur cette île portugaise de Tony Blair, George W. Bush et Aznar le 16 mars 2003, quelques jours avant le début de l’attaque contre l’Irak], reconnaît cette force comme constituant un «centre» qu’il lui plairait de contribuer à son renforcement.
Le gouvernement est, par conséquent, un exemple de la «classe moyenne» méritocratique qui, depuis longtemps, a pris la direction du PSOE. Cette caractéristique est plus prononcée en ce qui concerne la désignation des hauts fonctionnaires à tous les niveaux, en large partie «récupérés» au sein du cheptel du gouvernement de José Luis Zapatero [2004-2011] afin d’éviter des blocages et un temps d’apprentissage au sein de l’administration de l’Etat [le départ «imprévu» de Rajoy a signifié le remplacement de plusieurs centaines de hauts fonctionnaires et responsables de l’appareil d’Etat].
L’équipe économique
et la gestion de l’austérité
La ministre de l’économie, Nadia Calviño, coordonnera l’équipe économique composée par les sept ministres qui sont décisifs pour la gestion du budget. Directrice générale de la commission nationale de la concurrence du premier gouvernement de José Luis Zapatero, elle a exercé une fonction similaire entre 2006 et 2014 au sein de la Commission européenne, avant de devenir directrice générale du budget de la Commission. De ce fait, elle est responsable de la surveillance du pacte fiscal de l’UE. Proche de la présidente de la Banque Santander, Ana Botín, son indiscutable «orthodoxie» constitue jusqu’ici le message tranquillisant adressé aux «marchés». Ce qui s’ajoute à la promesse faite par le gouvernement Sánchez de respecter le budget 2018 du PP pour le reste de l’année, bien qu’il ait voté contre. [Ce budget a été adopté au Congrès des députés, avec beaucoup de retard, grâce à l’appui décisif du PNV – avec les contreparties financières pour cette formation bourgeoise du Pays basque – une semaine avant le passage de la motion de défiance, le 23 mai; le Sénat a adopté, après passage de 44 amendements, lundi 18 juin le budget, le PSOE s’est abstenu. Le respect du budget a été décisif pour que les cinq députés du PNV, le parti nationaliste basque d’une orthodoxie budgétaire éprouvée, soutiennent la motion de défiance.]
L’Andalouse María Jesús Montero, la ministre des finances, est la deuxième personnalité importante de cette équipe. Médecin de profession, elle a été à la tête de la gestion du système andalou de soins pendant les années de coupes budgétaires et d’extension de services en accord avec des cliniques privées, ce qui a engendré une forte distorsion du modèle régional de santé publique. En tant que responsable des Finances au sein de l’exécutif de la Communauté d’Andalousie, c’est elle qui a été la porte-parole de Susana Díaz lors des débats sur la réforme du système de financement des communautés autonomes. Débats qui ont mené à l’actuel cul-de-sac. Les deux joueront un rôle de premier plan autour de ce qui devrait être l’axe de ce qui reste de la législature: les négociations du budget 2019 et 2020.
Ciudadanos étant son principal rival électoral, le gouvernement Sánchez devra négocier ces budgets avec la même majorité parlementaire qui a soutenu sa motion de défiance, en particulier avec Unidos Podemos, dans le cadre fixé par deux forces nationalistes de droite, le PNV et le PDeCAT [Parti démocrate européen catalan], d’un côté, et, de l’autre, l’Union européenne, laquelle espère maintenir les accords [de rigueur budgétaire] conclus avec le gouvernement Rajoy en 2015.
Dans un contexte économique marqué par le retrait d’assouplissement quantitatif de la BCE [soit des achats massifs de titres de dette aux acteurs financiers], le poids croissant du service d’une dette qui approche 100% du PIB [entre 2008 et 2017, 250 milliards d’euros ont été versés par l’Espagne au titre du service de la dette, cf. El Mundo, 3 avril 2017], la hausse des prix de l’énergie et, enfin, le ralentissement des rythmes de croissance, la marge de manœuvre que parviendra à gagner le gouvernement Sánchez sur la gestion du déficit sera décisive pour faire des «gestes» et réaliser son programme en vue des élections générales. A ce propos, il suffit de lire les deux articles publiés récemment par Sin Permiso d’Andrea Maler et de Caterina Principe.
La crise constitutionnelle catalane
En dépit de l’alarme suscitée par la nomination de Josep Borrell en tant que ministre des affaires étrangères [Josep Borrell a été ministre des transports et des travaux publics entre 1991 et 1996 et président du Parlement européen entre 2004 et 2007], devenu depuis le début de la crise constitutionnelle catalane le fouet de l’indépendantisme, il est évident que la gestion du virage vers la reprise du dialogue avec la majorité nationaliste qui soutient le Govern de Quim Torra relèvera du dirigeant du Parti des socialistes catalans (PSC), Miquel Iceta.
A la suite de l’arrêt de la mise sous tutelle de la Catalogne, sous couvert de l’article 155 de la Constitution, et du contrôle préalable des dépenses de la Generalitat, l’une de ses premières annonces, le gouvernement Sánchez a annoncé une série de gestes qui restent à confirmer une fois examinées les limites légales avec lesquelles il doit composer. On peut citer: le transfert des prisonniers politiques en Catalogne, ce qui a engendré une polémique avec le juge Llarena [grand maître d’œuvre de la répression «judiciaire»] quant à savoir qui était responsable de la mesure; la nomination de Teresa Cunillera – une ancienne dirigeante du PSC et qui, lorsqu’elle était vice-présidente du Congrès [entre 2008 et 2016], était connue pour ses capacités à dialoguer – comme déléguée du gouvernement à Barcelone; et, en outre, l’affirmation de la nécessité de réformer la Constitution de 1978 faite par la ministre [de la fonction publique et de la politique territoriale] Meritxell Batet lors de la première conférence du PSC qui a suivi sa nomination.
Cela a contribué à relâcher la tension, ce qui était déjà patent à la suite du soutien apporté par le PDeCAT et ERC (Gauche républicaine de Catalogne) à la motion de défiance de Pedro Sánchez. L’échange d’appels et la disposition rendue publique de Sánchez et de Torra à se rencontrer, au-delà des déclarations tranquillisantes émises par les secteurs qui les soutiennent respectivement, ont placé la gestion de la crise sur un plan très différent. La priorité immédiate porte sur comment limiter l’autonomie d’initiative politique des juges, auxquels le gouvernement Rajoy avait cédé une large part de la gestion du conflit.
De même que pour Unidos Podemos, le gouvernement Sánchez et le PSC – qui souhaite faire oublier sa participation au «front constitutionnaliste» – placent la majorité indépendantiste du Parlament catalan devant l’option du «moindre mal», centré sur la négociation institutionnelle d’un programme minimum contre la répression et autour d’un budget de la communauté autonome, bien que la rhétorique maximaliste indépendantiste soit maintenue ainsi que les gestes en direction d’un Puigdemont toujours plus isolé [jeudi après-midi 21 juin, Quim Torra s’est rendu à Berlin pour rencontrer Puigdemont]. Le problème de cette stratégie est, toutefois, double: d’un côté, le potentiel de mobilisation indépendantiste, lors de prochaines échéances comme la Diada [11 septembre] ou pour la libération des prisonniers et, de l’autre, l’autonomie de l’appareil judiciaire qui a inculpé le procés [vers l’indépendance].
La question sociale et l’orientation européenne
Le gouvernement Sánchez, ainsi que le signalait Miguel Salas, a rencontré sa «zone de confort» sur le terrain social, grâce à l’attitude des directions syndicales qui ont fait de la stratégie du «moindre mal» une composante de leur identité. Alors que l’abrogation de la contre-réforme de la législation du travail du PP – ou celle du PSOE, pour des raisons claires – est écartée en raison de l’absence d’une majorité suffisante au Congrès des députés, où le gouvernement ne peut compter, en la matière, sur les voix du PNV et du PDeCAT, l’objectif se limite donc à renouer le «dialogue social» ainsi qu’à engager quelques réformes contre la précarité, une année avant les élections syndicales.
Les «partenaires sociaux» – le patronat, Commissions ouvrières (CCOO) et Union générale des travailleurs (UGT) – ont été les premiers à être reçus par Sánchez et par la nouvelle ministre du travail, Magdalena Valerio. Le but étant d’envoyer un message de consensus, qui doit s’étendre également à la renégociation du système de retraites dans le cadre de l’accord de Tolède [de 1995], considéré comme un «accord d’Etat», en intégrant une augmentation en fonction de l’indice des prix à la consommation, ainsi que l’avait sollicité le Congrès des députés en mars dernier. La réforme intégrale du Statut des travailleurs, par suite de l’accumulation de réformes partielles, reste pendante. C’est un terrain décisif du «dialogue social». D’entrée de jeu, «l’offensive syndicale», initiée ces derniers mois, a été différée afin de ne pas porter préjudice au nouveau gouvernement Sánchez.
Ce qui a permis au gouvernement Sánchez de briller de ses propres feux et, subitement, de retrouver une visibilité dans le débat européen sur l’émigration, après les années de «silence administratif» du gouvernement Rajoy, a résidé dans la décision d’accueillir plus de 600 réfugiés subsahariens de l’Aquarius. La décision a non seulement permis au gouvernement Sánchez de s’attribuer une stature «morale élevée» face au gouvernement italien de la Ligue et du Mouvement 5 étoiles – avec un ton, comme celui du ministre de l’équipement José Luis Ábalos, accusé d’un «buenismo» que l’éditorialiste de La Vanguardia, Enric Juliana, suggère de nuancer. Mais cette décision a également suscité une mobilisation sociale impressionnante, près de 2500 bénévoles ont accueilli l’arrivée au port de Valence des réfugié·e·s, ce qui sera évidemment rentabilisé par le nouveau gouvernement, et permet la constitution d’un front commun avec Macron contre le gouvernement de coalition eurosceptique italien [1].
Ce front commun avec Macron est un élément décisif de la stratégie de Sánchez pour tenter d’élargir sa marge de manœuvre pour ce qui a trait au pacte fiscal européen. Il s’agit là d’une alternative plus réaliste qu’un hypothétique «axe méridional», pour lequel le gouvernement d’Antonio Costa (PS) au Portugal ou celui d’Alexis Tsipras en Grèce ne montrent pas la moindre inclination, pris dans leurs négociations bilatérales avec la troïka à partir de positions de départ très différentes. Le grand moteur de cet «axe méridional», c’est le nouveau gouvernement eurosceptique italien que la Commission européenne, la BCE, l’Allemagne et la France tenteront de «contenir» et d’isoler par tous les moyens dès le prochain Conseil européen des 28 et 29 juin afin d’éviter qu’il s’allie aux gouvernements eurosceptiques et xénophobes d’Europe centrale.
Les droites désorientées
Deux semaines permettent beaucoup lorsque le vent est favorable et que l’opposition est soumise à l’impuissance. Le Parti populaire sombre dans le pire des scénarios de succession [qui doit être décidée le 5 juillet], avec un grand nombre de candidats – certains d’entre eux ridicules, comme José Manuel García-Margallo [ministre des affaires étrangères entre 2011 et 2016] – qui ont conseillé à Mariano Rajoy de s’en aller dès que possible et de retourner à son bureau de registrador de la propriedad [bureau des hypothèques] à Santa Pola, dans la Communauté autonome valencienne, et de renoncer à son siège de député, tout en promettant de se montrer équitable envers tout le monde. Malgré la minorité de blocage au Congrès des députés et la majorité au Sénat – ce qui écarte toutes réformes législatives, y compris minimales, sans même parler de réformes constitutionnelles – le PP n’exercera durant des mois d’autre politique d’opposition que celle d’être colérique.
Il en va de même pour Ciudadanos, qui a perdu subitement son principal point de polarisation électorale, qui en faisait une minorité majoritaire, et sa capacité de mobilisation dans la rue du «constitutionnalisme» en Catalogne, en raison de la nouvelle ouverture au dialogue catalaniste du PSC. Condamnée à la marginalité et à la frustration au sein du nouveau scénario catalan, cette formation a également vu son image «centriste» être cooptée par le nouveau gouvernement Sánchez. Y compris sa proposition non viable de réforme électorale, qui combinait la proportionnalité avec l’exclusion des forces nationalistes catalanes et basques – en fixant un seuil des suffrages à 3% à l’échelle de tout l’Etat –, le place à la droite du Parti populaire. La lutte pour l’hégémonie de la droite promet d’être acharnée lors des élections municipales et européennes, rendant ainsi difficile la constitution à l’avenir d’un bloc des droites.
Podemos et sa stratégie en direction du gouvernement Sánchez
La position d’Unidos Podemos semble très différente, en dépit des plaintes initiales de Pablo Iglesias face aux premiers mouvements «centristes» de Pedro Sánchez. Jeudi 14 juin, Sánchez a invité Iglesias à la Moncloa [siège de l’exécutif] afin d’examiner la possibilité d’un accord de législature. L’arithmétique parlementaire étant ce qu’elle est, le groupe socialiste de 84 députés a besoin des 68 députés d’Unidos Podemos et de Compromis [formation de la communauté Valencienne] pour relancer ses initiatives parlementaires bloquées par le PP au bureau du Congrès, ainsi que pour entamer la négociation décisive pour le budget 2019, qui doit se dérouler au cours du deuxième semestre de cette année. Sans cette collaboration, pour laquelle il dispose des «leçons portugaises» du Parti socialiste portugais [qui a l’appui, extra-gouvernemental, du Bloco et du PCP], le gouvernement Sánchez court le risque de pousser Unidos Podemos dans une opposition usante pour l’ensemble de la gauche. Et, peut-être plus important, de faire disparaître la perspective d’un gouvernement de coalition des gauches à l’issue des élections générales, ce qui est en soi un élément décisif de mobilisation.
Lors de la réunion du Conseil citoyen au niveau de l’Etat de Podemos, vendredi 15 juin, Pablo Iglesias a présenté un projet d’accord de législature en 20 points [voir la note 2] et a revendiqué son rôle politique, lequel a rendu possible la motion de défiance, qu’il avait proposée initialement au PSOE [au printemps 2017].
Sur les 20 mesures, un grand nombre consiste à reprendre des initiatives parlementaires, telles que l’augmentation des retraites, l’élimination de la participation aux frais médicaux (copagos) ou encore la dérogation de la loi muselière (ley mordaza), réalisables par l’actuel parlement. D’autres nécessitent une réorientation des dépenses budgétaires en 2019 et d’autres encore, comme la réforme proportionnelle de la loi électorale, nécessitent une majorité qui n’existe pas actuellement. Il n’est toutefois fait aucune mention du plafond budgétaire de 2019, ce qui suppose de laisser ouvert le budget 2019 à la négociation, et selon la situation européenne, le caractère anti-austérité ou simplement redistributeur en direction des couches les plus appauvries.
Podemos se situe donc, pour l’heure, dans une zone de collaboration parlementaire avec le gouvernement Sánchez. A la différence de 2004, l’arrivée au gouvernement du PSOE se fait par le biais d’une action parlementaire, la motion de défiance, limitée à la question de la corruption du PP. Le rôle des mobilisations sociales est très différent: de la remise en cause générale et directe du gouvernement Aznar, dans le contexte de la catharsis qui a suivi les attentats de mars 2004 à la gare d’Atocha [Madrid], à une résistance sectorielle, dont les acteurs sont, en particulier, les retraité·e·s et les mobilisations féministes dans le sillage de la grève du 8 mars.
Le cycle du 15 mai 2011 [«les indignés»], qui a poussé à la création de Podemos [début 2014], semble largement épuisé. Il n’en demeure pas moins préoccupant de constater l’absence de débat au sein de Podemos sur la question d’encourager et d’intervenir au sein des mouvements sociaux en tant que stratégie pour peser sur les rapports de force d’ensemble. C’est là sa faiblesse principale. (Article publié le 16 juin 2018 sur le site SinPermiso.info; traduction A l’Encontre)
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[1] Samedi 23 juin les deux présidents doivent se rencontrer à Paris, avant le sommet réduit de différents Etats européens consacré à ladite «crise migratoire». Il reste à voir si l’attitude du gouvernement espagnol dans «l’affaire de l’Aquarius» se renouvellera alors que le ministre de l’intérieur italien, Matteo Salvini, vient de «proposer» qu’un navire d’une ONG allemande qui a recueilli 224 réfugiés conduise «toute cette charge d’être humains à Gilbraltar, en Espagne, en France ou où vous voulez» en attaquant à nouveau durement toutes les tentatives de sauvetage, car les ONG contribuent selon lui au «trafic d’êtres humains» (site La Vanguardia, 21 juin 2018. (Réd. A l’Encontre)
[2] Sánchez a annoncé qu’il entendait poursuivre son mandat jusqu’à la fin de la législature, en 2020. Il a ainsi laissé de côté la possibilité d’élections anticipées, évoquées antérieurement.
Lors de sa rencontre avec Sánchez, Iglesias a présenté un programme en 20 points sur lequel se baserait un accord de législature. En voici le contenu:
1° Garantir que la hausse des pensions de retraite se base sur l’indice des prix à la consommation tout en dérogeant au facteur de soutenabilité [soit d’équilibre des comptes], que Podemos qualifie de mesure «d’appauvrissement» et que les pensions soient liées à l’espérance de vie.
2° La hausse des pensions non contributives [soit des retraites et une assistance santé qui sont accordées à des personnes qui, pour raisons d’incapacité n’ont pas pu cotiser ou n’ont pas cotisé durant une durée suffisante].
3° Des congés maternité et paternité égaux et non transférables.
4° Une loi d’égalité salariale et des mesures étendues et de soutien permettant la réalisation du pacte d’Etat contre la violence machiste.
5° La récupération de l’argent utilisé pour le sauvetage des banques.
6° Déroger à ladite «loi muselière».
7° Déroger aux deux dernières [contre-] réformes de la législation du travail du PSOE et du PP.
8° Une hausse du salaire minimum interprofessionnel à 1000 euros.
9° Une réforme de la loi sur les loyers urbains afin de mettre un terme à la bulle des loyers.
10° Une loi du logement correspondant aux propositions émises par les Plateformes de personnes affectées par la dette hypothécaire (PAH).
11° Garantir le caractère de banque publique de la SAREB [société de gestion des actifs provenant de la restructuration bancaire, soit la «bad bank» espagnole] ou des caisses d’épargne qui ont été nationalisées auparavant.
12° Une diminution des heures de travail afin «de favoriser une meilleure répartition pour tous les habitants».
13° Une loi pour les rentes garanties, lesquelles doivent assurer «un revenu à vie digne».
14° La fermeture des centres de réclusion d’étrangers (CIE) et accueil des réfugiés sur la base du quota négocié avec l’Union européenne.
15° Réforme de la loi électorale afin d’assurer une meilleure proportionnalité dans la répartition des sièges.
16° Suppression de la participation des patients dans les paiements de médicaments et de soins.
17° Renverser les coupes budgétaires dans le système de soins, l’éducation, l’invalidité, les services sociaux, la science, la recherche et développement et la coopération internationale.
18° Garantir par une loi les prestations en raison d’invalidité et de dépendances.
19° Une loi de lutte contre la pauvreté énergétique qui comprenne une extension et une amélioration réelle du «bon social électrique» [soit l’octroi de dispenses ou de diminution des factures d’électricité pour les ménages en difficulté, pour autant qu’ils remplissent certains critères].
20° Une dérogation de l’impôt sur le soleil [qui fait obstacle aux investissements dans lesdites énergies renouvelables]. Source: chaîne de télévision La Sexta qui rendait compte de la conférence de presse de Podemos qui s’est tenue le 15 juin. (Réd. A l’Encontre)